Les modèles de bijoux proposés font toute la fierté de la région saharienne. L'activité artisanale, sous toutes ses formes, est transmise de génération en génération. Elle est aussi source de revenus pour ses habitants. Elle rivalise et menace même la modernité. Rien ne vaut une bague en bois d'ébène surmontée d'une décoration ou un motif en argent pur. C'est très tendance, et en plus indémodable. A Serssouf, un petit atelier de fortune se trouve dans une ruelle étroite parmi quelques maisonnettes couleur ocre. L'établissement est composé de deux salles. La première est consacrée à la confection à la main, alors que la seconde fait office de musée où sont décorés et mis en valeur tous les objets et bijoux accompagnant les accoutrements traditionnels. Pour préserver ce patrimoine, les artisans travaillent avec les anciens moules. Tizabatine (boucles d'oreilles), tissghine (bague), tissghaline (collier) sont les plus prisés par les femmes de la région. D'ailleurs, sous leur grand châle, on les voit porter de magnifiques bracelets et des boucles d'oreilles au modèle rarissime et très original. Le motif le plus répandu est la croix du Sud. Quant aux prix, ils s'avèrent excessifs. Ils varient entre 3.000 DA un seul bijou à 40.000 DA la parure en argent pur. La majorité de la production est vendue localement et à l'échelle nationale. Bien évidemment, ce sont les touristes étrangers qui n'hésitent pas à s'offrir des bijoux pareils en guise de souvenir. Concernant la matière première, Ahmed Bidari, gérant de la coopérative Assaghan artisanat tradition « Nahagar », explique que l'argent suivait le cours de la banque Agenor. « Cela fait deux ans qu'Agenor n'investit plus dans le marché de l'argent en raison d'un litige avec certains importateurs », explique-t-il. Raison pour laquelle les artisans sont contraints de se tourner vers le marché noir pour sauvegarder leurs œuvres. Au marché informel, le métal est vendu à 16 millions le kilogramme. Selon le spécialiste, un kg d'argent fait ressortir en moyenne 10 parures de poids léger, à raison de 8 à 9 grammes le bijou. Quant à l'origine de la matière première, Ahmed Bidari refuse de dévoiler la provenance. « Le prix entre le marché noir et le marché légal n'est pas le même », dit-il. Soit une différence de 30.000 DA de plus au marché noir, et selon la disponibilité. Pour rappel, la localité de Serssouf compte une coopérative de 25 artisans âgés de 16 à 23 ans et sont encadrés par leurs aînés. De plus en plus de jeunes s'intéressent à cette activité. Certains y ont été initiés dès leur jeune âge. Ils sont étudiants, universitaires et même cadres à pratiquer l'activité artisanale en parallèle, le but étant la sauvegarde de ce patrimoine. C'est une véritable passion pour eux. « Le travail artisanal demande une forte concentration, un effort particulier et du talent surtout », précise Bidari. Selon lui, un artisan moyen peut réaliser un chiffre d'affaires de 120.000 DA par mois si la saison est propice. Cela étant dit, il révèle que les femmes sont pionnières dans la fabrication de bijoux artisanaux et la tannerie. « Les sacs en cuir, les accoutrements, les décorations d'intérieur sont les œuvres des femmes », dit-il. « Le cuir est importé essentiellement du Niger en raison de sa qualité supérieure », confie le même responsable. « Le cuir est traité et est plus résistant à l'humidité, contrairement au cuir local qui dégage une odeur particulière et parfois désagréable », explique-t-il.C'est dire que les artisans de Tamanrasset font tout pour sauvegarder l'art transmis par leurs aïeux depuis des lustres et ce, en dépit des contraintes que connaît le secteur de l'artisanat, et défendent l'authenticité des métiers et des qualifications héritées sur plusieurs générations.