Le procureur de la République, le magistrat Chalabi, a requis une peine de 7 ans contre l'accusé Abdelmalek A., professeur de l'éducation nationale à Bejaïa, assortie d'une amende de 50.000 DA, et une peine de 4 ans de prison ferme assortie d'une amende de 20.000 DA contre les accusés Mohamed Amine M., directeur général de l'Onec, Nadjib Y., inspecteur de l'éducation en physique à Constantine, et Lakhdar G., inspecteur de l'éducation en physique (Bejaïa). Le procès de cette affaire s'est ouvert, jeudi dernier, lors d'une audience spéciale, au niveau du tribunal correctionnel de Sidi M'hamed, après deux reports. La salle était complète. Les proches des détenus étaient fortement présents. Des cadres de l'éducation, notamment des inspecteurs, ont tenu à assister pour signifier leur solidarité avec les accusés, ont-ils dit. La présidente de l'audience, la magistrate Bouhelouane, a décidé d'entamer le procès en absence du représentant du ministère de l'Education nationale et certains témoins. Seuls huit témoins, parmi 39 convoqués, étaient présents dans la salle. Le DG de l'Onec : « Je ne suis pas un traître » Le DG de l'Onec, Mohamed Amine M., était le premier à être auditionné. Il a rejeté en bloc les accusations retenues contre lui. « J'ai passé 34 ans dans le secteur de l'éducation, dont 16 ans comme inspecteur chargé de la préparation des épreuves du baccalauréat avant d'être désigné à la tête de l'Onec en 2015 », dit-il avant de fondre en larmes. « Madame la présidente, je ne suis pas un traître ni un criminel et j'ai veillé à accomplir ma mission. » Il a expliqué au tribunal les étapes de la préparation des sujets jusqu'à l'opération finale de distribution, les 26 et 27 mai dernier, aux directions de l'éducation. « J'assure que les fuites des sujets n'ont pas été au niveau de l'Onec. La responsabilité incombe aux directions de l'éducation et non à l'Onec », s'est-il défendu. Il a fait savoir que 30 à 50 sujets sont élaborés dans chaque matière. « On donne des chiffres aléatoires à chaque sujet. Après, on fait un choix d'un chiffre. Le sujet est alors remis à la commission concernée pour étude. L'opération est confiée à des commissions. Chaque commission travaille dans une salle et il est strictement interdit de se déplacer entre les salles. L'Onec, c'est comme une prison. » La présidente de l'audience a évoqué le règlement intérieur qui interdit aux cadres de l'Onec l'utilisation du téléphone portable et de micro-ordinateurs, alors que les enquêteurs de la Gendarmerie nationale ont saisi, lors de la perquisition, un flash disk et un PC en possession des accusés poursuivis ainsi que des téléphones portables. Le DG de l'Onec a précisé que 136 téléphones portables ont été réquisitionnés par la direction de l'Onec. « C'est moi qui ai remis les téléphones aux enquêteurs », a-t-il tenu à préciser. Quant au PC saisi en possession de l'accusé Nadjib. Y., le DG de l'Onec a expliqué qu'il le lui a été remis suite à la demande de son adjoint pour revoir les examens. Nous étions informés que les sujets ont été déjà programmés lors des sessions précédentes. Je suis le premier responsable et je ne peux pas laisser passer des erreurs », a-t-il justifié. C'est l'Onec qui a remis les téléphones portables et les PC aux enquêteurs La juge a également évoqué les expertises techniques ayant fait ressortir que les brouilleurs n'étaient pas efficaces. « Ces appareils ont été testés en présence même des policiers et il était impossible, durant 2 mois, d'effectuer des appels », a-t-il assuré. « On a installé, pour la première fois, 25 caméras de surveillance à l'intérieur du centre d'impression. Nous avons multiplié le nombre de brouilleurs. Toutes les mesures ont été prises par la ministre de l'Education lors d'une visite à l'Office ». De son côté, l'accusé Nadjib Y., inspecteur de l'éducation durant 17 ans, n'a pas pu retenir ses larmes lors de son audition. « J'ai déposé mon dossier de retraite au mois d'octobre 2015 et je m'attendais à être honoré pour mon intégrité professionnelle, mais je me suis retrouvé en taule. » L'accusé a rejeté les accusations. « Certes, on a trouvé en ma possession un flash disk. J'en avais besoin parce qu'il contenait des applications. Impossible de procéder à des fuites en l'absence d'internet. Nous étions complètement coupés du monde. » Je n'avais pas une intention criminelle Cet inspecteur a défendu ses collègues : « Aucun inspecteur d'éducation n'a été impliqué dans des fuites. Je veux bien connaître les vrais auteurs qui ont touché à mon intégrité. » L'accusé Abdelmalek A., lui, a été filmé par les caméras en flagrant délit de dissimulation de copies de l'examen de gestion et d'économie. Il a reconnu qu'il a violé le règlement intérieur. « Je n'avais pas une intention criminelle. J'ai gardé cette copie pour une proche, candidate au baccalauréat. Il m'était impossible de la lui remettre. Je ne sortais pas. » En fin d'après-midi, la salle a vibré suite aux applaudissements de l'assistance quand le procureur de la République a assuré, dans son réquisitoire, que la présidente de l'audience est parmi les meilleurs juges. Le verdict est prévu le 21 novembre prochain.