Le Nigeria a bouclé hier son marathon électoral. Il a choisi dans 24 des 36 Etats ses gouverneurs et les parlements locaux dans 34 Etats. C'était leur troisième rendez-vous avec les urnes en moins d'un mois après les législatives et les présidentielles organisées les 9 et 16 avril dernier sous haute surveillance. Dans dix Etats, les élections de gouverneurs ont été reportées, selon la Commission électorale nationale indépendante. Pour décisions judiciaires dans cinq (Kogi, Adamawa et Sokoto dans le Nord, Cross River et Bayelsa dans le Sud). Pour organisation récente de ces scrutins dans cinq autres (Anambra, Ekiti, Edo, Ondo, Osun). A Kaduna et Bauchi, deux Etats du Nord, elles ont été repoussées à demain. Les autorités ont eu peur d'un remake des violences qui ont accueilli la proclamation des résultats du scrutin présidentiel : 516 morts et 75.000 déplacés, selon plusieurs ONG. Un bilan qui rappelle pour les 160 millions de Nigérians le cauchemar de la guerre du Biafra de 1967 qui les a plongés dans une guerre civile qui a fait en 30 mois entre un et deux millions de morts. L'ONU qui a suivi la victoire de Goodluck Jonathan, un chrétien du sud contre l'ex-chef de la junte militaire, Muhammadu Buhari, un musulman du nord et les violences qui ont éclaté entre les communautés musulmanes et chrétiennes dans 14 Etats du nord, notamment Kano, Kaduna, Sokoto et Bauchi, veut enquêter pour déterminer si des crimes contre l'humanité ont été commis. «Les violences postélectorales dépassent le cadre des affaires intérieures du pays», estime la Cour pénale internationale. Aujourd'hui, même le candidat malheureux à la présidentielle est passé à l'offensive. Son parti, le Congrès pour un changement progressiste, compte présenter un dossier devant la justice pour forcer la Commission électorale à soumettre les bulletins d'au moins onze Etats à des analyses biométriques. «Aucune élection crédible ne s'était déroulée dans le Sud et le Sud-Est où les résultats auraient été concoctés par le biais de fraudes des empreintes du pouce et le bourrage d'urnes en faveur de Jonathan, dit-il. Sur sa lancée, il n'hésite plus à qualifier la victoire de son rival de «mandat volé». Une accusation qui semble destinée à dissuader le Peoples Democratic Party (PDP), le parti du président Jonathan, donné en mauvaise posture par les sondages de toute tentative de fraude dans ce scrutin majeur. Les gouverneurs qui ne gèrent pas seulement des budgets considérables mais distribuent les places dans la fonction publique espèrent utiliser pendant leur mandat de quatre ans, leur poste comme tremplin pour accéder à la magistrature suprême. Dans cette guerre de mots entre les deux camps politiques opposés, aiguisée par les animosités créées par les réelles disparités entre le Nord et le Sud dans ce pays où 70% de la population est pauvre, la secte Boko Haram compte transformer ses disparités économiques entre conflits entre les musulmans et les chrétiens. Trois bombes ont explosé hier dans la ville de Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno, au nord-est du pays, sans faire de victimes.