Tout un chacun sait que notre système de santé est sinistré. Nos hôpitaux sont austères, vétustes, sales et très peu accueillants. Le malade hospitalisé doit apporter sa literie. La nourriture qui lui est servie est infecte et il est obligé de faire appel à sa famille pour se nourrir décemment. Le défilé des couffins à l'intérieur des services hospitaliers est une caractéristique visible de nos hôpitaux. Des tentatives visant à rendre plus humain l'accueil des malades ont été faites. Elles ont été vite confrontées aux réalités économiques des hôpitaux et au scepticisme et manque d'adhésion des citoyens à cette initiative. Les promesses n'ont donc pas été tenues. Aux heures de visite, les hôpitaux deviennent de véritables «souks» du fait des va-et-vient des personnes ; mais aussi du fait de la débauche des denrées alimentaires, fruits, laitages et autres victuailles qui remplissent les couffins des visiteurs. Ce qui est strictement interdit, il faut le signaler, dans les cliniques privées. Les examens de radiologie et de biologie sont pour la plupart dirigés vers le secteur privé. Les appareils sont généralement en panne. Le scanner, actuellement examen radiologique ordinaire, est souvent impossible à faire dans le secteur public. Quand l'appareil n'a pas rendu l'âme, les dates de rendez-vous sont dissuasives. Il est évident que moins il y a d'examens radiologiques et/ou biologiques, moins il y a sollicitation de consommables et moins le budget de l'hôpital est chahuté. Cela arrange le gestionnaire qui doit, malgré lui, faire une gymnastique compliquée — souvent au détriment du malade, il faut le préciser, — pour répondre aux exigences des besoins des citoyens et à celles d'un budget qui n'est pas adapté à l'ambition qui lui est dictée. C'est pour cela qu'un ou des appareil(s) en panne n'est en aucun cas contrariant. Aujourd'hui, nous sommes «à la case départ». Veut-on, par cet état de fait, «forcer» le citoyen à recourir au secteur privé pour se soigner ? Veut-on sonner le glas du secteur public en le disqualifiant de cette façon ? Enfin, pourquoi les cliniques privées sont toujours pourvues de spécialistes et leurs appareils de radiologie et de laboratoire ne restent jamais en panne ? Toutes ces questions sont légitimes et méritent d'être posées. L'intérêt accordé aux salaires, actuellement humiliants des personnels de santé, participe, de toute évidence, de la même stratégie. C'est avec les ressources humaines que l'on peut construire un système de santé performant et viable. L'agent de salle et l'infirmière sont les personnes sur lesquelles il est indispensable de s'appuyer pour offrir le meilleur accueil au malade et humaniser l'hôpital. Il est impossible de demander à ces deux repères stables de la structure hospitalière de donner le meilleur d'eux-mêmes, compte tenu de leurs conditions de travail et des salaires qu'ils reçoivent. Ils ne peuvent pas se consacrer pleinement à leur mission si les tracas de la vie quotidienne pèsent sur leur destin personnel.