Vingt partis politiques et plusieurs personnalités nationales, dont l'opposant islamiste Hassan Al Tourabi, l'ancien Premier ministre et leader du parti Oumma, Sadek El Mahdi et le communiste Mohamed Ibrahim Nogoud, sont en conclave depuis hier à Juba, la capitale du semi-autonome de Sud-Soudan. Le Parti du congrès national (NCP), un temps attendu, a opté pour le boycott de cette conférence. Minni Minawi, l'ancien leader des rebelles du Darfour et actuel conseiller du président et Salva Kiir, le premier vice-président soudanais et leader du Sud-Soudan, participent à ce rassemblement dont les travaux devraient prendre fin demain. Reportée à plusieurs reprises, la «Conférence de Juba» tentera, selon Pagan Amum, le secrétaire général du Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM), ex-rébellion sudiste, membre depuis 2005 d'un gouvernement d'union avec le Parti du congrès national (NCP) de M. Béchir, et hôte de la réunion, de contribuer à l'instauration d'un dialogue national préalable pour parvenir à un consensus sur les enjeux nationaux et sortir le pays de la crise. Principaux enjeux, d'après Malik Agar, un responsable du SPLM, le conflit du Darfour, la mise en œuvre de l'accord de paix ayant mis fin en 2005 à la guerre civile Nord-Sud, les élections générales d'avril 2010 et le référendum prévu en janvier 2011 sur l'indépendance du Sud-Soudan. Comme les autres participants, il réfute l'existence de tout «projet» d'alliance politique contre le pouvoir à Khartoum. «Nous nous regroupons pour former un front uni», répliquent les leaders de l'opposition au NCP qui les soupçonnent de «tentative d'alliance cachée contre le président». «Nous avons exigé des conditions pour participer à la conférence, mais nous n'avons pas reçu de réponse», affirme Mandoor Al Mahdi, le secrétaire politique du NCP. Parmi les conditions posées, l'invitation à cette conférence des 60 partis politiques enregistrés comme partants pour les élections générales (présidentielle, législatives et régionales). Repoussées à deux reprises, elles sont annoncées pour avril 2010. Autre condition posée par Khartoum : la rédaction de la loi encadrant le référendum de 2011 sur la sécession du Sud-Soudan où, selon les Nations unies, «plus de 1.200 personnes ont trouvé la mort dans les violences interethniques depuis le début de l'année». Les deux grands partis du Nord et du Sud, qui négocient ce texte sous la supervision de l'émissaire américain Scott Gration, s'opposent sur deux questions de poids. Le SPLM souhaite que seuls les sudistes vivant au Sud-Soudan puissent voter et estime que la règle du «50% + un vote» doit suffire à garantir l'indépendance du Sud lors du référendum. Le NCP veut étendre le droit de vote à ceux vivant au Nord et dans la diaspora et juge que le seuil de «75%» doit être atteint pour «valider» la consultation. Les deux partis, qui ont signé en 2005 l'accord de paix global (CPA) qui a mis fin à la guerre civile entre le Sud et le Nord (deux millions de morts sur deux décennies), arriveront-ils à un compromis avant que la situation tendue entre le Nord et le Sud, toujours divisés par des facteurs religieux, ethniques et idéologiques, ne dégénère ? Le NCP, dont le président est sous le coup d'un mandat de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et contre l'humanité, doit «trouver» aussi une solution à la crise du Darfour qui a fait, depuis 2003, selon l'ONU, de 300.000 à 500.000 morts et plus de 2,5 millions de réfugiés et de déplacés. Son dernier appel aux rebelles de cette région de l'est du pays à déposer les armes et à rejoindre les pourparlers de paix, ne semble pas avoir été entendu encore. Le sera-t-il, en octobre prochain, lors du prochain round de pourparlers à Doha que le président soudanais souhaite comme la «dernière étape sur le chemin de la souffrance subie par le peuple» ?