«Kaïd Ahmed, homme d'Etat» Editions Juba - 516 pages. Kamel Bouchama persiste et signe. Encore une fois, il nous livre de l'Histoire en cette année, la bonne Histoire selon ses annonces, celle qui instruit les jeunes et leur donne le véritable visage de notre pays, de ses hommes, de leurs pratiques et de leurs contingences, des événements et de leurs aboutissements... «Kaïd Ahmed, homme d'Etat», est le titre de son nouvel ouvrage avec lequel il va droit au but pour restituer à ce responsable, hier controversé, toute sa grandeur ou, à tout le moins, la place qui était sienne avant que des «gens bien intentionnés» l'ont jugé sévèrement en le diffamant et en l'affublant de mille et une avanies afin de le vouer au triste sort des «recalés». L'auteur Kamel Bouchama, l'écrit avec beaucoup de mesure, non sans croire en cet avenir qui, dit-il, sera certainement plus clément, en tout cas plus juste, envers ce haut dirigeant du pays, lorsque les langues «se délieront», dans le bon sens évidemment, pour témoigner de sa bravoure, de sa compétence, de sa probité, de sa modestie, de la justesse de ses positions ; surtout et enfin, de son amour transcendant pour l'Algérie. C'est alors que la loi de la nature lui rendra justice et rétablira la vérité. Là, l'Histoire sera dans son élément..., elle ne sera que juste, malgré ces faussaires et ces illusionnistes malveillants, qui essayent de «se jouer d'elle», car, sinon, comment pourrait-elle nous dévoiler le passé et nous arborer le présent avec toutes leurs chroniques, leurs aventures, leurs tragédies et, on ne le dira pas assez, avec leurs authenticités ? Comment ne peut-elle pas réhabiliter, quand il le faut, ceux qui ont été traités autrement que ce dont ils devaient être traités..., c'est-à-dire justement, conformément à la réalité ? C'est cela l'Histoire. Elle est implacable, elle est comme le destin, inexorable, inévitable, mais surtout pertinente et authentique. Quant à l'ouvrage lui-même, il est d'une grande facture. L'auteur explique dans plus de 500 pages, à travers 12 chapitres et des annexes, qui ont également leur pesant d'or, dont ce «fameux mémorandum inédit» destiné à ses pairs au Conseil de la Révolution, la marche inexorable de Kaïd Ahmed, depuis les années du nationalisme d'avant 1954, aux côtés des Ferhat Abbas et autres valeureux militants, jusqu'à ses nombreuses responsabilités après le recouvrement de notre souveraineté nationale, en passant par les années de maquis, l'Etat-major général de l'ALN, sa participation aux premières négociations d'Evian et au Congrès de Tripoli qui a mis au grand jour ces malheureuses crises qu'a connu notre révolution... Les principaux chapitres de cet ouvrage nous racontent son parcours depuis sa prime jeunesse depuis qu'il a quitté ses élèves, sa craie et son tableau, son combat pour la liberté, ses différentes missions au sein de la révolution, après l'Indépendance, ses portefeuilles ministériels, sa trajectoire au parti du FLN, son regard sur la Révolution agraire, sa vision économique dans le pays, son intérêt pour la jeunesse, la culture et les relations internationales... Pour ne pas trop nous appesantir sur cette présentation, laissons l'écrit nous révéler de «bonnes feuilles» qui méritent qu'on s'y attarde pour comprendre les dissensions qui existaient au sommet de la pyramide. Ainsi, le lecteur fera son choix pour s'arrêter sur ce qui est à même de lui insuffler ce désir de mieux comprendre son Histoire. L'auteur Kamel Bouchama nous explique qu'en matière de Révolution agraire, par exemple, le départ de Kaïd Ahmed ne sera jamais officiellement expliqué aux militants, ni même aux citoyens qui espéraient quelques informations au sujet de leurs «hommes d'Etat». Ce silence n'était que la manifestation visible des impitoyables luttes politiques au sommet du pouvoir. L'on pouvait percevoir ce bras de fer entre partisans d'un développement du pays garanti par la mise en place de solides institutions qui insufflent et pérennisent l'effort de la nation, et ceux qui privilégiaient un système reposant sur des clans et groupes d'intérêts en dehors de tout contrôle par d'authentiques institutions au service de la collectivité nationale. Sur le plan du parti, l'auteur relève que Kaïd Abmed était convaincu que le FLN qui avait réussi à mener le pays à sa libération, au prix d'immenses sacrifices du peuple algérien, possédait les ressources nécessaires et, surtout, la force morale de conduire le pays durant la phase d'édification et de livre Par ailleurs, l'auteur écrit, en défendant âprement la mémoire de Kaïd Ahmed, qu'en tant qu'acteur et témoin des luttes politiques du peuple algérien pour son émancipation, il ne cessait de dénoncer les mœurs politiques en cours qui avaient causé d'incommensurables dommages durant la lutte de libération nationale, insidieusement reconduites après l'indépendance de l'Algérie. En somme au niveau de la «direction politique» du pays, et jusqu'à l'élection d'une Assemblée nationale et d'un président de la République, «le Conseil de la Révolution s'était attribué les fonctions du gouvernement, du parti et du Parlement car la doctrine politique et constitutionnelle algérienne a été réorientée dans un autre sens, et le culte de la personnalité, autour de la personnalisation du pouvoir, n'ayant été depuis que mieux reconstruit.» En effet, il y a beaucoup à apprendre dans cet ouvrage, surtout quand il nous arrive d'un auteur aussi prolifique comme Kamel Bouhama qui se passionne en voulant trop nous expliquer afin que nous connaissions mieux notre Histoire et les Hommes qui l'ont écrite. Le livre sera la semaine prochaine dans les librairies.