Vladimir Poutine se prépare à revenir, en mars 2002, au Kremlin qu'il avait quitté, 4 ans auparavant, faute de pouvoir se représenter pour un troisième mandat consécutif. A la faveur de la réforme constitutionnelle prolongeant le mandat présidentiel de quatre à six ans, l'homme fort de la Russie pourra théoriquement rester à la présidence jusqu'en 2024. Le retour de Poutine, annoncé en grande pompe, et le maintien de Medvedev au poste de Premier ministre, l'homme qu'il avait désigné, en 2008, pour lui succéder au Kremlin, consacrent une alliance forte et stable, cependant mal vécu par une frange de la classe politique et de l'opposition protestant, dans les rues de la capitale, contre le scénario de l'échange de poste. L'ancien ministre des Finances depuis 2000, Alexeï Koudrine, considéré comme un apôtre du contrôle des dépenses et figure respectée des investisseurs étrangers, ne se voit pas «dans le nouveau gouvernement» qu'il entend ne pas servir «inconditionnellement» en raison de son opposition de principe à une hausse des dépenses budgétaires. «Cela va créer des risques supplémentaires pour le budget et l'économie. Cela veut dire qu'on ne pourra pas réduire nos déficits», a-t-il dit, tout en relevant que, dans un tel contexte, la Russie sera encore plus dépendante de ses exportations d'hydrocarbures. La déception du conseiller économique de Medvedev, Arkadi Dvorkovitch, qui ne voit dans le retour de Poutine «aucune raison de se réjouir», exprime un malaise grandissant dans l'équipe dirigeante rapidement contenu par le porte-parole Dmitri Peskov qui a souligné, tard samedi, que «si une personne est en désaccord avec les choix stratégiques du tandem, elle devra quitter l'équipe». Mais le duo fait encore rêver. L'alliance en béton entre le jeune Medvedev, le juriste de 46 ans, cultivant l'image d'un homme moderne, féru de nouvelles technologies, et de son mentor, fort d'une popularité indéniable légitimée par son rôle salvateur de la nouvelle Russie, tient bon la route. «L'expérience des dernières années montre que Poutine et Medvedev ont mené une politique coordonnée, sans friction, sans différence d'opinion réelle dans le domaine socio-économique. bPeu importe qui fait quoi, le résultat sera le même», juge Vladimir Tikhomirov, économiste au groupe financier russe Otkritie, selon gazeta.ru. Les chantiers de la réforme, fondée sur le redressement opéré pendant l'ère Poutine et confortée par l'œuvre de «modernisation» réussie par Medvedev, a ses défis et ses contraintes liés aux problèmes économiques, au fléau endémique de la corruption et la crise démographique. Selon des analystes, le 3e mandant de Poutine pourrait s'avérer bien plus difficile à négocier que les précédents au regard du poids de la crise d'endettement qui sévit en Europe dont la Russie dépend en investissements et en exportations de pétrole et en gaz. Face aux «problèmes (qui) s'accumulent, si l'on croit le spécialiste, Rouslan Grinberg, qui dirige l'Institut d'économie de l'Académie russe des sciences, l'enjeu des réformes reste essentiel dans le processus de redressement économique. Un rapport de l'agence financière S&P de février dernier affirme que, faute de réformes, un endettement massif de l'Etat (11,1% du Pib en 2015, 585% en 2050) et une chute de la croissance (de 4% à 1,5%) sont à prévoir. Pour le tandem Poutine-Medvedev, les défis ont déjà commencé.