…Les échecs développent les facultés de réflexion de l'enfant qui commence à manipuler les représentations… Aristote avait déjà noté que : «les premières impressions sont toujours celles qui ont pour nous le plus d'attrait» . Le grand maître Nicolaï Kroguious, «détenteur d'un quasi – monopole de la psychologie échiquéenne depuis de nombreuses années», a étudié beaucoup l'influence de l'âge d'initiation sur la durée de la période des résultats optimums et sur l'intervalle séparant apprentissage et première réalisation échiquéenne notable. Il affirme que les joueurs ayant débuté dans l'enfance (soit avant l'âge de 10 ans) deviennent grands maîtres d'un âge plus précoce que ceux ayant appris à jouer à l'adolescence (à partir de 11 ou 12 ans) et leur période de créativité optimale est nettement plus longue. En analysant un échantillon de 60 grands maîtres, Kroguious a défini que l'âge moyen auquel ils apprennent à jouer aux échecs est de 10,5 ans. Cependant, on observe parfois un apprentissage précoce des règles avec quasi-immédiat et nouvel apprentissage, définitif celui-là, quelque mois ou années plus tard : «tout se passe comme si l'apprentissage ne pouvait avoir lieu de façon signifiante qu'à la condition que l'intérêt pour le jeu lui préexiste». On voit ainsi que d'habitude même les futurs grands maîtres ne commencent à jouer aux échecs qu'à partir de 10-11 ans. Les règles abstraites du jeu d'échecs sont difficiles pour les jeunes enfants. Pourtant Kroguious souligne l'importance de l'initiation précoce. C'est pourquoi, les amateurs et les entraîneurs des jeux intellectuels classiques ont accueilli le JIPTO (nouveau jeu de société) avec intérêt. Le JIPTO de base est facile pour les enfants à partir de 5 ans, ils interprètent ses règles chacun à sa manière : pour les uns ce jeu imite une chasse, pour les autres c'est une scène de conte de fée. Les enfants, qui jouent au JIPTO, s'initient plus vite aux autres jeux intellectuels. Igor Soukhine dans l'introduction de son livre des Echecs pour les jeunes enfants [1994] décrit les difficultés d'adaptation des enfants aux activités scolaires. Un élève de la première classe (c'est-à-dire de la classe préparatoire) doit se soumettre aux règles de la vie scolaire, il doit savoir se contrôler, se concentrer sur l'étude, être discipliné et organisé. Un élève doit être initié aux raisonnements logiques, il doit savoir observer et mémoriser. Soukhine souligne que les enfants passifs qui ne sont pas initiés aux activités intellectuelles et qui n'aiment pas réfléchir éprouvent de grandes difficultés d'adaptation à l'école élémentaire. Après ces remarques, Soukhine expose son argumentation sur l'importance de l'initiation précoce aux Echecs : «Et les Echecs peuvent venir ici en aide comme un bâton magique, ils semblent être crées spécialement pour la préparation les enfants à l'école. L'activité ludique favorise beaucoup le développement des processus psychiques et de la volonté … Les échecs développent les facultés de réflexion de l'enfant qui commence à manipuler les représentations. L'expérience ludique permet mieux comprendre les autres, aide prévoir leurs actions futures et les tenir compte pour la choix de ses propres actions. Le jeu forme les sentiments de l'enfant, ses qualités morales…» Notons que le JIPTO a été créé spécialement dans des buts éducatifs, en particulier, pour la préparation les enfants à l'école tandis que les échecs ont été modifiés sporadiquement pendant des siècles, principalement dans le but de les rendre plus intéressants pour les joueurs. Le JIPTO suscite l'intérêt ludique par la diversité de ses versions et par la grande possibilité de leur adaptation pour tous les goûts. «Les échecs ne sont qu'un jeu qui procure aux enfants beaucoup de joie et de plaisir, mais ils sont un moyen efficace de leur développement intellectuel. Le processus de l'initiation aux Echecs favorise la faculté d'orientation sur un plan (qui est très important pour l'école) et le développement des activités analytique et synthétique, des facultés de réflexion, de raisonnement, de conclusion, apprend l'enfant de mémoriser, de comparer, de généraliser, de prévoir les résultats de ses activités, contribue à la formation des qualités utiles comme la persévérance, l'attention, l'autonomie, la patience, la souplesse, la concentration, l'inventivité, etc. C'est pourquoi, il faut commencer l'initiation à ce jeu sage le plus tôt possible, bien sûr, de la façon accessible pour l'enfant. L. Vygodski soulignait que l'apprentissage doit avancer d'un pas le développement, le faire progresser». On peut appliquer ces arguments au jeu de Dames, plus adapté pour l'initiation précoce, et au JIPTO. Soukhine propose pourtant de commencer l'apprentissage des Echecs à partir de 3 ans : «Un enfant de trois ans est déjà une personne avec son monde intérieur particulier, ses habitudes, ses désirs, qui s'affirme obstinément et défend son autonomie. Il maîtrise la parole, connaît plus de 1000 mots, marche très bien, sait beaucoup faire, pose des innombrables questions, éprouve une curiosité vive pour son environnement… L'enfant pour la première fois se sent comme une personnalité, se sépare des adultes. Il veut dorénavant «être comme un adulte» mais il ne le peut pas». Mais l'initiation de tous les enfants au sport intellectuel à partir de 3 ans est impossible ce que Soukhine reconnaît dans les termes suivants : «A trois ans l'attention de l'enfant est assez développée mais elle est encore instable. Il ne se concentre pas plus de 10-15 minutes même sur une activité extrêmement passionnante». C'est pourquoi l'initiation aux échecs demande beaucoup d'efforts et prend beaucoup du temps, Soukhine note que «les leçons doivent passionner l'enfant», «si nous voulons que l'enfant assimile bien quelque chose, nous devons l'introduire dans l'activité de cet enfant», il faut «aider patiemment l'enfant à comprendre la différence des forces des diverses figures» des échecs : «Par exemple, si nous commençons l'apprentissage des enfants plus grands par l'explication des termes comme «rangée», «colonne», «diagonale» et seulement après nous leur «enseignons» les figures, pour les enfants de 3 ans c'est assez compliqué … il est mieux d'abord de leur montrer les figures échiquéennes et de montrer les «voies» sur l'échiquier pendant l'étude des possibilités de chacune des figures … Nous conseillons d'accompagner la lecture d'un conte didactique par sa représentation. Beaucoup d'enfants ont des poupées : Neznaïka, Bouratino, Pertouchka … Utilisez-les pour la lecture-représentation du conte et vous verrez comment augmente l'intérêt des jeunes enfants pour les leçons d'échecs».