Mourad Hachid, rédacteur en chef de l'édition électronique d'El Watan, fait sien ce constat lucide d'un responsable du Figaro : Vaut mieux désormais pour un journal être le premier sur le web qu'être à la même heure que ses concurrents dans les kiosques. El Watan s'est rendu compte assez tôt que sans une présence sur la toile, il serait moins visible et perdrait cette frange de lecteurs qu'on désigne du vocable d'internautes. Ils seraient en moyenne 60 000 à consulter quotidiennement le journal qui, des années après l'ouverture de son site en 1997, éprouvait encore beaucoup de difficultés pour être accessible. «Après la mise en ligne de la version actuelle du site, réalisée par notre hébergeur NetAktiv, société basée à Paris, nous nous sommes rendus compte rapidement qu'il fallait aller plus loin. Notre hébergeur NetAktiv ne répondait plus à nos attentes. Nous avons opté en mai 2009 pour un hébergeur spécialiste des sites de presse. Il s'agit de SDV Plurimedias basé à Strasbourg», explique le responsable du site. Le journal débourse 2500 euros par mois pour cette boîte qui s'occupe aussi des sites d'Arte, du Figaro.fr, des échos, des dernières nouvelles d'Alsace et d'autres titres de la presse régionale française. La fréquentation a depuis doublé. Pour autant, M. Hachid qui dirigea un moment le bureau de Tizi-Ouzou, estime que « la presse web en est à ses balbutiements dans notre pays. On ne fait que balancer les pages du quotidien sur le web». Cet état de fait a pour lui une explication. «La raison principale a pour origine la faible pénétration d'Internet et l'inexistence d'une culture générée par ce média, on est en retard». Les journaux restent peu alimentés, deux à trois fois par jour alors que des quotidiens comme le Monde ou Libération procèdent à des mises à jour une vingtaine de fois. Pour autant, le journal en papiers ne risque pas de disparaître. Hachid est confiant. «C'est un peu le même phénomène que pour la télévision dont certains à son avènement ont cru annoncer la fin du cinéma. Je pense que certaines personnes découvrent en premier lieu l'édition électronique mais finissent par acheter le journal. Les lieux et les habitudes de lecture sont différents. Si au bureau on consulte la toile, exercice par ailleurs fatiguant, on feuillette davantage un journal allongé au salon ». El Watan envisage de lancer vers le mois de mai une nouvelle version de son site qui sera plus attractive et surtout plus réactive. «Nous avons sollicité le rédacteur en chef du monde.fr pour nous aider à mieux comprendre le contenu d'un site de presse». Les idées ne manquent pas. On y logerait les blogs des journalistes, lancerait un tchat live avec des personnalités du monde des arts ou de la politique. Hachid reste pourtant sceptique. «Pourra-t-on facilement convaincre nos politiques de débattre en direct avec les internautes comme cela se fait ailleurs ?», s'interroge-t-il. On ne veut pas seulement que l'édition web soit le pâle reflet de l'édition papier mais alimentée continuellement par un réseau dense de correspondants et une rédaction qui doit réagir aux événements avec promptitude. Internet a enfin selon un interlocuteur un avantage. «Le nombre de consultations d'un titre indique mieux que tout l'audience de chacun». Avec Internet, tout sera net ?