«Histoire de ma vie» de Fadhma Aït mansour Amrouche, préfaces de Vincent Monteil et Kateb Yacine. Editions Bouchène, 219 pages. Récit poignant s'il en est, «histoire de ma vie» de Fadhma Ath Mansour Amrouche raconte l'itinéraire d'une femme au destin tragique. C'est la première fois qu'une femme parle de sa vie sans fioriture, ni honte. Née hors mariage, Fadhma vit dans sa chair réprobations et avanies. Dès sa tendre enfance. Sa maman la confie aux soins des sœurs blanches, parce qu'elle est maltraitée par ses oncles. L'enfant, qui ne sait rien de son histoire, voit cependant plus clair lorsque sa génitrice lui révèle tout. Plus d'un demi-siècle après, longanime, Fadhma se souviendra avec une étonnante précision du jour où un garçon la jette dans une haie de cactus. Déjà instruite, la jeune fille qui a fréquenté l'école des sœurs blanches, se réfugie des mois durant dans le monde livresque. La lecture est son unique échappatoire. Le livre est composé de chapitres dans lesquels Fadhma Ath Mansour Amrouche raconte l'école des sœurs, son passage à l'hôpital des Ath Mengueleth, sa vie au village Ighil Ali après son mariage avec Belkacem Amrouche, et, enfin, son exil en Tunisie. Fadhma Amrouche parle des années difficiles qu'elle a vécues en Tunisie, sans oublier toutefois d'évoquer les moments exquis passés auprès de son ruisseau, les églantiers et les guirlandes de clématites fleuries, le froid glacial et le soleil scintillant. Au début du siècle dernier, commence l'exil. Pour fuir la misère, la famille s'installe en Tunisie où elle vit quarante ans. Pour autant, les conditions de vie des déracinés ne s'améliorent pas. A peu de choses près, l'indigence est la même. En dépit de cette situation intenable, la famille se réconforte lorsqu'elle se réunit. C'est dire que le véritable exil commence pour Fadhma Ath Mansour Amrouche lorsque ses enfants eurent quitté la Tunisie pour aller travailler en France. Pendant cette période, dit-elle « j'ai retrouvé tous les poème et les chants d'exil de mon pays. Tout en berçant mon dernier-né, je berçais ma douleur. Combien j'ai chanté depuis». A la fin du livre Fadhma souligne que «Jamais, malgré les quarante ans que j'ai passés en Tunisie, malgré mon instruction foncièrement française, je n'ai pu me lier ni avec les français, ni avec les arabes. Je suis restée, toujours, l'éternelle exilée, celle qui, jamais, ne s'est sentie chez elle nulle part. Aujourd'hui, plus que jamais, j'aspire à être chez moi, dans mon village, au milieu de ceux de ma race ». Outre qu'il dévoile l'itinéraire de la famille Amrouche, ce livre montre un pan de la structure mentale de société kabyle d'alors.