Photo : Lylia M. La dernière opération de relogement des familles de l'avenue de Roumanie est prévue pour samedi 10 avril. Des mécontents ? C'est la plus grande appréhension à laquelle on s'attend puisque un tirage au sort sera effectué pour arrêter la liste desbénéficiaires. C'est, aujourd'hui jeudi, qu'aura lieu en principe l'épineux tirage au sort qui décidera sur l'avenir de l'avenue de Roumanie. Des centaines de familles seront convoquées en vue de boucler la longue liste des bénéficiaires et leur attribuer par la suite leurs nouveaux logements à la nouvelle ville Ali Mendjeli. Rappelons que le wali avait fermement annoncé son intension de mener à terme l'opération de déménagement de tout le site pour le 10 avril prochain. Seulement voilà, après le relogement de 27 familles le 4 mars dernier et les émeutes qui ont occasionné des dégâts et des blessés parmi eux une vingtaine d'agents de l'ordre, cette nouvelle et dernière phase de relogement pour ce quartier sera plus compliquée et plus sensible du fait qu'elle concernera 800 familles. Les rumeurs vont bon train ces jours-ci au sujet de ce «vaste» déménagement, l'un des plus importants qu'a connu la ville, et beaucoup craignent le pire. Déjà avec le tirage au sort qui aura lieu au centre culturel Ben Badis, il faut s'attendre à voir des débordements et des protestations, car toutes les précédentes opérations du genre ont connu cela. Difficile pour l'administration de gérer ce flux de personnes et distinguer «qui est qui» en si peu de temps, surtout qu'on parle déjà de faussaires parmi les familles. Le face à face entre habitants et policiers samedi prochain risquerait de déborder à tout moment si jamais il y aura des mécontents. Et apparemment ils seront nombreux à s'opposer à un éventuel départ, surtout si leurs revendications ne seront pas prises en compte. Mardi matin, devant l'une des mosquées de la rue concernée, nous avons approché un groupe de vieux. Tout en se montrant prêts à dialoguer avec les autorités, ils n'écartent pas pour autant qu'au moindre problème, ils sauront «répondre par la force si nécessaire». «Au lieu d'établir une liste définitive dès le début, ils nous font souffrir avec leur tirage au sort, en plus nous n'avons pas encore reçu de convocations pour ce tirage. Et ils ne s'arrêtent pas là, j'ai lu ce matin dans un journal arabophone que des personnes politiques de la ville traitent nos enfants de voyous. Qu'importe ces provocations, je suis un enfant de cette ville et je souhaiterai une seule chose : qu'on nous rende nos biens sans Hogra» nous dit un quinquagénaire dont la famille habite le quartier depuis 95 ans. Même si les rues paraissent encore calmes, nous rencontrons plus loin des jeunes qui semblent plus excités, car c'est de leur côté que les choses se compliquent. Du fait que beaucoup d'entre eux sont des nouveaux mariés, ils risqueraient de ne pas bénéficier d'un logement. Un d'entre eux hausse le ton et nous prévient : «Ils ont promulgué une nouvelle loi interdisant aux jeunes mariés depuis 2008 de bénéficier d'un logement. Pourquoi je n'aurai pas droit à un logement comme les autres ? Cela fait 36 ans que j'habite avec mes parents et mes frères dans un trois pièces. C'est une mesure discriminatoire et je peux vous dire que nous n'allons pas vivement réagir». Et il continue : «Pourquoi personne n'est venue pour nous rencontrer et s'expliquer avec nous?». L'avenue de Roumanie, quartier populaire datant de l'époque coloniale, longe la rivière du Rhumel et occupe un point stratégique dans la ville puisqu'elle relie la gare routière ouest au centre ville. A l'instar du quartier Bardo qui a été rasé depuis plus deux ans, la délocalisation de l'avenue de Roumanie, (et d'autres quartiers populaires de la région) entre dans le cadre du plan de modernisation de la ville des ponts. L'idée d'en faire des tours administratives fut abandonnée, c'est un immense parc qui remplacera le site qui s'étendra sur des centaines d'hectares.