Photo : Lylia M. Depuis l'application des réformes dans le secteur de la Justice, les établissements pénitentiaires enregistrent une amélioration dans la prise en charge des 57.000 détenus. Mokhtar Felioune, directeur général de l'administration pénitentiaire et de réinsertion, reconnaît, dans cet entretien, ue la surpopulation des prisons entrave la bonne application des réformes. La construction de 81 établissements pénitentiaires représente une soupape pour ces centres de détention. Implantés en dehors des grandes villes, ces nouveaux centres seront dotés de salles de cours, d'ateliers de formation professionnelle, d'infirmeries ainsi que d'installations sportives. Parlant de la «réussite des réformes» de la Justice, le directeur général des établissements pénitentiaires s'est appuyé sur l'avis des experts étrangers (venus de France, d'Angleterre, de Suisse, d'Italie, d'Espagne et du Canada, et de membres d'organisations internationales telle que la Croix-Rouge) qui se sont tous montrés satisfaits des efforts fournis par l'Algérie dans ce domaine, notamment dans la couverture santé et le respect des droits du prisonnier et des droits de l'homme au sein des établissements pénitentiaires. Concernant le travail d'intérêt général, Mokhtar Felioune a affirmé que cette nouvelle disposition est mise en application. Il est à rappeler qu'elle concerne les personnes non récidivistes et dont la peine ne dépasse pas une année de prison ferme. M. Felioune évoque également le taux de récidive qui est d'une moyenne de 41% dont 65 % ne dépassent pas 35 ans. La scolarisation dans le milieu carcéral est en hausse au fil des années. Plus de 20 200 détenus ont bénéficié cette année de ces avantages. M. Felioune ne s'en cache pas, la violence n'épargne pas nos prisons. Le phénomène du suicide n'est pas aussi étranger. Dans le programme des réformes de la Justice, le ministère a décidé de construire 81 prisons pour désengorger les prisons surpeuplées. Où en est le projet ? Effectivement dans le programme de relance économique 2005/2009, le président de la République a inscrit la réalisation de 81 établissements pénitentiaires à travers le territoire national. Certes ces établissements vont remplacer certains centres construits avant 1900, devenus obsolètes et ne répondant pas aux exigences de la politique pénitentiaire adoptée par l'Algérie. En ce qui concerne la réalisation, la totalité de ces établissements sont en chantier dont le taux de réalisation varie entre 10 et 95 %. Les 13 établissements qui sont enregistrés dans le programme d'urgence ont été confiés à des entreprises étrangères. 19 000 places seront prêtes d'ici la fin 2010. Vers la fin du mois de mai prochain, nous allons recevoir trois établissements dans trois wilayas, Bejaia, Bordj Bou Arréridj et Djelfa, d'une capacité de 5 000 places. Le reste, qui a été confiée aux wilayas, seraréceptionné à partir de la fin 2010. Avec l'ouverture de ces établissements, nous allons mettre fin au problème de la surpopulation. L'espace réservé aux détenus passera de 2 à 9 m⊃2;. Les conditions de détention seront différentes et meilleures. Pouvez-vous nous donner un aperçu sur ces établissements ? Ces établissements n'ont rien à avoir avec les anciennes prisons. Le centre de Bejaia, à titre d'exemple, conçu pour recevoir 1000 détenus, prévoit 3 500 m⊃2; pour le bloc médical. Les classes de Cours peuvent contenir deux tiers des détenus à la fois. En d'autres termes, les enseignants peuvent donner des cours à 700 détenus à la fois. Il y aura également des espaces pour les activités culturelles et sportives. Nous avons pensé également aux familles des détenus qui auront plus d'infrastructures pour les accueillir dignement. Qu'en est-il de la gestion des établissements pénitentiaires et comment se fera la répartition des détenus ? La gestion des établissements pénitentiaires est un volet important dans le programme des réformes. On peut le scinder en deux volets. Le premier concerne l'amélioration de l'organisation de gestion des établissements pénitentiaires par les textes et par la façon de la gestion elle-même. Plusieurs textes ont été promulgués après 2005 en application de la loi pour mieux organiser le fonctionnement des établissements pénitentiaires. Les formations effectuées par les cadres du ministère de la Justice en France, en Angleterre, en Suisse, en Italie, en Espagne et au Canada, leur ont permis de s'enquérir justement et de l'organisation et de la gestion. Quant au deuxième volet, nous nous intéressons à la mise à niveau des ressources humaines par la formation dans les différents domaines de gestion. Depuis 2003, 35 000 agents ont suivi une formation continue notamment dans les domaines de la gestion, des droits de l'homme, des problèmes des détenus. Le ministère inscrit chaque année un programme de formation assez conséquent pour mieux former les gestionnaires dans les différents paliers de responsabilité. La plupart des détenus sont jeunes, n'est-ce pas ? Effectivement, plus de 65% de la population carcérale esont âgée de moins de 35 ans. La grande majorité des ces détenus a commis de petits délits liés au vol, à la consommation de drogue ou inculpés pour coups et blessures volontaires. Le niveau scolaire de ces détenus est inférieur à celui de la deuxième année moyenne. Pour ces deux raisons, il est du devoir du ministère de la Justice de prendre en charge cette frange de la population par les différents programmes de formation et d'enseignement. Quel est le taux de récidive ? Aucun systèmeau monde n'est par le phénomène de récidive. Il diffère d'un pays à un autre. Les chiffres des pays européens sont plus élevés par rapport aux nôtres. Le taux de récidive dans notre pays fluctifie. Il est entre 40 et 43%. Ces chiffres ne sont pas alarmants du moment que le système a trouvé d'autres alternatives comme la peine d'intérêt général insérée dans le code pénal. Dans le même ordre d'idées, la réforme devrait instituer d'autres peines alternatives. L'administration pénitentiaire œuvre à encourager les détenus à la scolarité ou à la formation professionnelle. Combien d'élève stagiaires avez-vous enregistré pour cette année et combien de détenus sont-ils inscrits aux examens du baccalauréat et du BEF pour l'année 2009/2010 ? Je tiens saluer le président de la République qui a encouragé l'activité de l'enseignement et de la formation dans nos établissements. Le premier magistrat du pays encourage, chaque année, les lauréats du bac du BEM et les nouveaux diplômés, par des remises de peines. Et c'est d'ailleurs pour cette raison que la majorité des détenus se bouscule pour s'inscrire aux différents examens. Pour l'enseignement général, tous niveaux confondus, nous avons enregistré 23 746 inscrits sur 57 000 détenus, soit plus de 3 000 de plus par rapport à l'année précédente. Les établissements pénitentiaires seront représentés par 1 852 candidats au bac 2009/2010, et 3906 candidats au BEM. Par rapport à l'année dernière, on a enregistré une nette amélioration. A cela s'ajoutent les 20 200 détenus qui suivent une formation au niveau de nos établissements dans 77 spécialités. Après avoir accompli un saut «qualitatif» en matière de formation et d'enseignement, les prisonniers auront à purger leurs peines tout en étant «utiles pour la société» ; le défi du ministère de la Justice pour les années prochaines sera de verser les détenus dans les travaux d'intérêt général. Parlez-nous des détenus qui «travaillent» dans le secteur de l' agriculture notamment dans les wilayas de Naâma et El Bayadh ? Dans le cadre des réformes nous avons prévu un chapitre pour développer le travail à l'extérieur des établissements pénitentiaires. En premier lieu, nous allons construire 25 établissements en milieu ouvert et de permettre aux détenus d'être productifs. Ces établissements seront situés à l'extérieur du tissus urbain. Ce sont les détenus qui sont en fin de peine qui seront affectés vers ces « bases de vie ». Actuellement nous disposons de 8 établissements. A titre d'exemple, je peux situer l'établissement de Messerghine (Oran) qui a une vocation agricole. Les détenus travaillent la terre et font dans l'apiculture. A Labiodh, dans la wilaya de Nâama, nous avons quelque 90 détenus qui ont planté 2 000 arbres entre oliviers et pommiers. Depuis l'année dernière, on a commencé à participer à la campagne de reboisement en collaboration avec la direction générale des forêts. Cette année on a procédé au reboisement de 200 hectares dans les hauts plateaux. A qui est destinée la production agricole ? Nous avons l'Office national des travaux éducatifs qui travaille sous l'égide du ministère de la Justice. C'est lui qui est chargé de l'achat des semences et de la récupération des produits. Ce dernier verse une marge des bénéfices aux détenus. On a appris récemment que 2500 ex-détenus ont réussi à monter leurs affaires dans les différents dispositifs de l'emploi ; quel est votre commentaire ? Ces 2 500 ex-détenus ont pu monter leurs petites entreprise en collaboration avec le ministère de la Solidarité nationale avec son agence ADS et également l'Angem. Au niveau des wilayas, les directions de l'action sociale font un travail extraordinaire pour la réinsertion sociale des ex-détenus. Il y a deux ans, notre administration a offert des machines à coudre aux ex-femmes détenues. Elles ont constitué leurs petits réseaux pour la commercialisation de leurs produits. Les coiffeurs, les coiffeuses, les maçons, les mécaniciens …, formés dans nos établissements, ont pu décrocher des travaux à l'extérieur. Le ministre de la Justice a créé cinq services extérieurs de réinsertion sociale des détenus. Nous allons multiplier ces services à travers toutes les wilayas. Ces services ont pour vocation de recevoir les détenus et les aider à se réinsérer dans la société soit par le travail, par l'assistance psychologique... La mission principale d'une prison est d'assurer la sécurité à la société. Qu'en est-il de la sécurité à l'intérieurs des prisons ? Les ex-détenus parlent de violence, d'agressions, il y a eu même, selon leurs dires, des cas viol et de suicides... Notre maison est de verre, nous n'avons rien à cacher. Ces choses arrivent au sein de toutes les prisons du monde. Aucune institution pénitentiaire n'est épargnée par les cas de violence à l'intérieur des prisons. Effectivement en 2009 on a enregistré deux cas de suicide. Par rapport à ce qui se passe dans d'autres prisons du monde, le nombre enregistré en Algérie est insignifiant. Les différentes activités effectuées à l'intérieur des établissements nous ont aidés à apaiser les esprits et d'éviter beaucoup d'incident. Les visites des magistrats, des avocats, des familles des détenus nous poussent à donner la meilleure image de nos établissements. D'aucuns disent qu'il y des malades mentaux parmi les détenus ... Nos équipes médicales détectent les détenus malades dès les premiers jours de détention. Ces personnes sont transférées vers des établissements spécialisés de la Santé. Le mois de février dernier, il a été signalé une évasion de la prison de Médéa ; que s'est-il passé exactement ? Une chose est certaine. Il n'y a pas eu de complicité comme cela a été rapporté par la presse. En revanche, il y a eu négligence. Ce dossier est pris en charge par et les responsables ont été condamnés par les justice.