Le débat sur la presse nationale est engagé entre la tutelle les professionnels et les universitaires. L'objectif étant de parvenir à la professionnalisation de l'information et l'efficacité de la communication. C'est d'ailleurs l'intitulé de la journée d'étude organisée jeudi dernier au Musée du Moudjahid par le secrétariat d'Etat auprès du Premier ministre chargé de la Communication. Une rencontre qui s'inscrit dans le cadre de la célébration de la journée mondiale de la liberté de la presse. Les recommandations constitueront une feuille de route pour normaliser le secteur et combler le vide juridique et organisationnel. M. Azzedine Mihoubi, secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de la Communication l'a relevé, à l'ouverture des travaux de la journée, en présence de nombreux éditeurs (secteurs public et privé), d'enseignants universitaires à l'image de M. Achour Fenni, docteur d'Etat en économie, enseignant à l'université d'Alger, M. Belakacem Ahcène Djabbalah, ancien cadre supérieur du secteur de la Communication et professeur associé à l'Université d'Alger, Dr Chebbine Saïd, consultant et enseignant universitaire… Selon le ministre, le moment est opportun, 20 ans, après la promulgation du code l'information, de faire l'état des lieux et évaluer ce qui a été réalisé au profit de la profession. « Aujourd'hui le débat est engagé, alors autant aller au fond des choses et traiter les grands aspects de la presse nationale. La corporation a des revendications. Elle doit s'impliquer dans la prise de décision, dès lors qu'aucun objectif ne sera réalisé en dehors de la profession », a souligné le ministre. Le ministre a, à cet effet, annoncé l'organisation le 5 mai prochain de cinq ateliers thématiques desquels émanera la feuille de route pour l'élaboration du nouveau code de l'information. Il s'agira de l'évaluation de l'expérience menée par les journalistes depuis la promulgation en 1990 du code de l'information, de mettre en évidence l'importance et l'apport du sondage d'opinion ainsi que les résultats obtenus des sondages effectués sur le lectorat et ses préférences. Le troisième atelier se penchera sur le marché de la publicité, en tant que source de financement. Le ministre part d'un constat : « la pérennité de certains titres est encore tributaire de la publicité», a-t-il affirmé. Quant aux deux dernières thématiques, elles porteront sur l'éthique et l'évolution de la presse audiovisuelle et électronique en Algérie. « Les rapports de ces ateliers constitueront une plus value, enrichissant les débats et répondant à toutes les aspirations, celles des éditeurs, des journalistes, des diffuseurs et tous les acteurs intervenant dans le vaste champ médiatique », a tenu à souligner le ministre, estimant qu'il faut rompre avec les débats superficiels et stérile. «DÉPASSER TOUTES LES DIVERGENCES» L'ouverture du champ médiatique a certes été une extraordinaire expérience. En 1987, le secteur ne comptait que 6 titres. En 2010 le nombre s'est élevé à 80 dont 8 titres spécialisés. « Il est donc impératif de structurer toute l'activité journalistique et organiser la corporation à l'exemple des autres professions, tels les architectes, les avocats, les médecins ». « Pourquoi ne pas se référer à l'organisation des médecins, au sein de syndicats, d'ordre, selon la spécialité », a déploré le ministre estimant que l'organisation des journalistes profiterait énormément à la promotion de leur profession surtout à leur protection de tout abus. « J'appelle la corporation, journalistes de la presse écrite, de la radio, de la télévision, les éditeurs, les techniciens et les diffuseurs à s'organiser et dépasser toutes divergences », a conclu le ministre. «LE JOURNALISTE DOIT SAVOIR CE QU'IL PEUT DIRE ET CE QU'IL NE PAS DIRE» Consacré à deux grands axes à savoir l'avenir de la presse écrite en Algérie et la presse et la loi, l'espace ouvert jeudi dernier au professionnels de la presse et aux universitaires a mis en évidence les lacunes du secteur. Dans leur constat, certains intervenants ont déploré la désorganisation du secteur qui compte selon les derniers sondages 80 titres et des milliers de journalistes, le manque de professionnalisme chez les nouvelles recrues dont la formation est à parfaire, la diffusion gangrenée par l'informel, les lobbies de l'argent et les lobbies idéologiques qui détiennent certains monopoles, l'absence de cadre juridique régissant le secteur et protégeant le journaliste contre tout abus, à condition qu'il se conforme à l'éthique et la déontologie, la difficulté d'accès à l'information...autant de défaillances portant atteinte à l'exercice de la profession comme il se doit. Mais ils attestent à l'unanimité qu'il faut normaliser le secteur et parvenir au respect de la profession. Selon M. Abrous Outoudert, directeur du quotidien Liberté, il faut actualiser le code de déontologie. « Respecter le lecteur est un principe de maturité qu'il faut nourrir », a-t-il souligné, appelant les pouvoirs publics à donner des assurances que le marché est libre tout en facilitant l'accès aux sources et protégeant le journaliste. Il relève, à cet effet, l'amateurisme chez les nouvelles recrues, souvent à l'origine de graves problèmes, de diffamation surtout. Il suggère d'ailleurs la désignation d'un médiateur au sein de chaque organe de presse. Rejoignant cette idée, M. Dajballah rappelle que la désignation d'un médiateur est incluse dans l'une des recommandations, d'une réunion sur la presse tenue à l'hôtel El Djazaïr. De l'avis des experts de l'information et de la communication, il revient aux journalistes de mettre en place un Conseil d'éthique et de déontologie. « C'est une nécessité absolue pour la corporation », estiment-ils. Pour sa part, M. Chebbine estime qu'il faut mettre au point certaines règles. «Le journaliste doit savoir ce qu'il peut dire et ce qu'il ne pas dire », a-t-il souligné, citant l'exemple de certains pays où le syndicat des journalistes met au point les règles de déontologie. « En Algérie il n'y a pas d'organisations ou de syndicats représentatifs de journalistes pour mettre en place un code de déontologie. Néanmoins chaque organe de presse peut élaborer un code propre à son entreprise », a suggéré l'intervenant, rappelant que dans un code de déontologie il n'y a que des textes qui protègent le journaliste.