La mondialisation et le développement des TIC imposent à toutes les sociétés de se doter de mécanismes pour se protéger contre toute attaque ou intrusion à travers leurs ordinateurs. Contrairement à plusieurs pays disposant d'une loi sur la cyber sécurité, l'Algérie est dotée uniquement d'une loi sur la cybercriminalité, jugée incomplète. « Devant la menace croissante d'attaques et d'intrusions, il est temps d'ouvrir un large débat sur les dispositifs à mettre en œuvre pour s'y protéger ». Le directeur général de la SSRI (Société de sécurité des réseaux informatiques), Derdouri a exprimé ce vœu hier lors d'une conférence-débat consacrée à la sécurité des systèmes informatiques, animée au siège de l'APS. De l'avis du conférencier, la question de cyber sécurité concerne toutes les entreprises et institutions nationales et même le simple citoyen interpellant tous les intervenants utilisant l'informatique et les TIC d'une manière générale. « La cybercriminalité est une menace faisant partie d'autres menaces.A la différence de la législation algérienne, les textes de lois sur la cybercriminalité en France, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne sont plus complets parce qu'ils abordent le problème dans sa globalité », a souligné M. Derdouri, estimant qu'il faut définir une stratégie et créer des organismes, appuyés par des commissions de techniciens, au niveau des secteurs privé et public, à l'effet de faire l'état des lieux. Comme c'est le cas dans bon nombre de pays, à l'exemple de la Chine, a Russie, des USA qui adaptent leurs lois à cette nouvelle forme de menace. FORMATION DE 10 INGÉNIEURS ET INSTALLATION D'UN GIX En Algérie, aucune statistique n'a été établie sur la cyber attaque, dès lors que les incidents ne sont pas rapportés. Mais les autorités et les experts dans les TIC sont conscients des dangers des intrusions et leur impact fort préjudiciable sur la sécurité nationale, sur le plan économique, compte tenu des pertes. Ne pouvant confier sa cyber sécurité à un pays étranger, l'Algérie lancera cet été la formation d'une dizaine d'ingénieurs dans le domaine en partenariat avec une compagnie américaine. Selon M. Derdouri, le choix des experts américains n'est pas fortuit. Il répond au souci des autorités algériennes de mener à bien cette mission, étant donné l'expertise américaine en matière de maîtrise de cet outil. Etant une combinaison d'équipements et de logiciels, la cyber sécurité nécessite, selon M. Derdouri, le développement de logiciels. C'est d'ailleurs l'ambition des initiateurs de la formation d'ingénieurs. Selon le conférencier, l'idéal serait de parvenir à la production des ses propres logiciels ou de les adapter à la mesure de la menace. L'ENI forme cette année des ingénieurs en cyber sécurité. La sortie de la première promotion aura lieu cet été. En vue de sécuriser l'utilisation d'Internet, l'Algérie procédera au cours de cette année à l'installation de son premier GIX (Global Internet Exchange). Mme Zohra Derdouri, présidente de l'ARPT, l'a annoncé hier. Infrastructure physique, le GIX permet l'interconnexion directe des réseaux, par l'intermédiaire des points d'échange, plutôt qu'à travers un ou plusieurs réseaux tiers, évitant le passage à travers plusieurs réseaux. LES TIC, CIBLES PRISÉES DES ATTAQUES Générant des gains incommensurables, la cyber criminalité suscite un intérêt accru par rapport au trafic de drogue. Les cibles privilégiées des attaques sont les TIC (38%), les institutions gouvernementales (22%) et les banques et institutions financières (21%). Selon M. Derdouri, es enjeux sont de taille et les pertes financières dues aux intrusions informatiques dans le monde s'élevaient en 2008 à plus de 1000 milliards de dollars. 138 compagnies américaines ont perdu 54 milliards de dollars en 2009 en raison de ces attaques. Il rappelle que le commerce électronique à travers Internet (e-commerce) génère plus de 150 milliards de dollars par an aux Etats-Unis et une interruption d'un jour peut coûter 425 millions de dollars de pertes. Entre 2009 et 2010, les autorités américaines ont promulgué sept lois dans ce domaine.Tout en reconnaissant la difficulté de parvenir à un accord international en matière de cyber sécurité, le conférencier estime qu'il est impératif d'établir une coopération internationale. Selon une compagnie américaine, 140 gouvernements ont acquis des programmes leur permettant d'utiliser l'Internet comme une arme de combat. Pour certains experts, la cyber sécurité est une arme offensive et de dissuasion militaire. Pour sa part, le directeur général de l'APS, M. Nacer Mehal a mis en exergue la nécessité d'ouvrir un «grand débat» autour de la question de la cyber sécurité. «Cette question de cyber sécurité concerne toutes les entreprises et institutions nationales et le débat autour de cette question doit interpeller tous ceux dont le travail est lié à l'informatique et à l'utilisation des TIC ».