8 mai 1945-8 mai 2010. 65 ans après, les Algériens se souviennent douloureusement des massacres perpétrés par les forces d'occupation et les milices coloniales à Guelma, Kherrata et Sétif. En commémoration de cette date, plusieurs festivités ont été organisées pour dénoncer les actes barbares des colons français et rendre un vibrant hommage aux martyrs de la révolution. Des marches, conférences et des rencontres thématiques ont été organisées à l'occasion. Le ministre des Moudjahidine, Mohamed-Cherif Abbas, le secrétaire d'Etat chargé de la Communication, Azzedine Mihoubi se sont déplacés à Sétif pour participer à la marche de fidélité initiée par les Sétifiens. Une marche massivement suivie. Ils étaient quelque 25.000 personnes à emprunter l'itinéraire utilisé par des Algériens épris de liberté un certain 8 mai 45. Ils se sont recueillis devant la stèle érigée à la mémoire de Bouzid Saâl, le premier martyr de ces massacres. Des responsables d'organisation nationales, des personnalités, des moudjahidine et les témoins de ces douloureux événements ont tenu à partager ces moments. Aux premiers rangs, de jeunes scouts entonnaient des chants patriotiques dont « Hayou Chamal Ifriqia » et « Min Djibalina ». Des moments empreints d'émotion et de patriotisme. Cette marche constitue pour la grande moudjahida, Annie Steiner, militante active de la zone autonome d'Alger, âgée de 82 ans, « un grand moment ». Elle exprime son émotion et sa fierté, « car, dit-elle, le jeune homme qui est tombé à cet endroit est mort pour un drapeau, pour un seul drapeau, et aujourd'hui j'en vois des milliers autour de moi ». L'occasion fut également une opportunité pour ressusciter ce qui s'est passé en ce 8 mai 19 45. Ceux qui ont vécu ce drame étaient au rendez-vous. Parmi eux, M. Layachi Guetrani (71 ans). Il avait alors tout juste 6 ans. Il se rappelle vaguement de gens, de beaucoup de gens qui couraient dans tous les sens. « En courant pour rentrer chez moi, je heurtai une masse sur le sol, c'était un jeune homme mort, baignant dans une mare de sang. Il m'arrive encore aujourd'hui de le revoir dans mes rêves ». A Gulema, l'événement n'est pas passé inaperçu. Les habitants de cette wilaya se sont recueillis à la mémoire des 18.000 victimes des massacres considérés comme étant un crime contre l'humanité. La Fondation du Mai 45, créée en 1995, atteste que ces crimes constituent « de flagrantes violations des droits de l'homme ». Les témoignages des uns et des autres évoquent 11 endroits de la wilaya de Guelma qui furent le théâtre de ces horreurs, notamment au centre-ville, à Héliopolis, à Belkheïr, à Boumahra, à Oued Ch'hem et surtout au « crématoire » de Marcel Lavie. Le scénario et l'ambiance de commémoration sont les mêmes à Kherrata. Il convient par ailleurs de souligner que la commémoration du 8 mai 1945 a été marquée par la polémique qu'a suscitée le film «Hors-la-loi» de Rachid Bouchareb. Un film qui représentera l'Algérie au prochain Festival du cinéma de Cannes. Une polémique qui fera dire à l'historien Gilles Manceron que « la campagne contre le film Hors-la-loi est un combat d'arrière-garde ».