Un enfant perdit son père, son oncle le reçut comme orphelin. Il avait un petit veau, son oncle avait une paire de bœufs, il les menait aux champs et les gardait. Il faisait paître son veau dans la prairie ; quant aux bœufs, il les attachait. Un mois après, son veau devint gras, les bœufs de l'oncle étaient maigres. «O orphelin, lui demanda son oncle, pourquoi mes bœufs sont-ils maigres ?» -«Je n'en sais rien, répondit l'enfant, je les fais paître tous ensemble.» - «C'est bien», repartit l'oncle. Le lendemain, il suivit l'orphelin, il trouva que le veau paissait en liberté dans la prairie, et que ses bœufs étaient attachés. Il revint sans dire mot. Le lendemain, il appela l'orphelin. «Viens à la chasse.» - «C'est bien, mon oncle», répondit l'enfant. Ils partirent ; arrivés à l'orée d'une forêt, l'oncle donna un fusil à l'orphelin et lui dit : «Reste dans ce passage ; moi, je battrai la broussaille ; quand je te crierai : tire, vise bien.» Il courut à la maison, couvrit le veau d'une couche de poussière et le conduisit jusqu'au passage : Tire, juif d'orphelin, le voilà de ton côté.» L'orphelin visa, le veau tomba, il s'approcha et reconnut son veau. Il alla au village et invita les habitants à prendre la viande de son veau, il ne réclama que la peau. On lui remit la peau qu'il déposa dans un coin sans la saler. Quand elle sentit mauvais, il la porta au marché pour la vendre. Le premier passant cracha dessus. Vers le soir, il la vendit pour une pièce percée. Il se mit en route et rencontra deux hommes qui portaient une tunique de laine, ils la vendirent cent francs ; l'orphelin jeta furtivement sa pièce percée dans le tas et se mit à crier : «Au voleur ! au voleur ! ces gens-là m'ont volé de l'argent.» On s'attroupa. «Combien t'ont-ils volé ?» -«Cent francs et une pièce percée.» Les deux hommes s'en défendaient : «O Musulmans, c'est un mensonge, nous n'avons que cent francs.» Les gens qui venaient du marché leur dirent «Comptons, si nous ne trouvons que les cent francs, vous serez innocents ; si nous trouvons les cent francs et la pièce percée, vous vous avouerez voleurs de cet enfant.» On compta, on trouva cent francs et une pièce percée, et l'enfant reçut le tout. Il arriva chez son oncle et lui dit «O juif d'oncle, tue tes bœufs, jette les peaux dans un coin sans les saler, j'ai vendu la peau de mon veau cent francs et une pièce percée.» L'oncle invita les gens du village à tuer ses bœufs. «Mangez la viande, leur dit-il, mais laissez-moi les peaux.» On égorgea sa paire de bœufs, on mangea la viande, et on lui remit les peaux. Il appela l'orphelin : «Que ferai-je de ces peaux ? - «Laisse-les dans un coin, répondit l'orphelin, sans les saler ; quand elles sentiront mauvais, tu les porteras au marché pour les vendre.» Il les porta au marché pour les vendre. Le premier passant cracha dessus ; la nuit venue, il ne les avait pas vendues. Il les jeta, et rentra chez lui en pleurant. Il appela l'orphelin : «Viens ramasser du bois, ô orphelin.» -«Allons-y, mon oncle.» Ils montèrent sur un frêne pour couper du bois. L'oncle suspendit l'enfant à une branche de l'arbre avec une corde et partit. Un vieillard vint à passer, il conduisait sur un mulet la femme de son fils, et l'enfant, depuis son arbre se mit à chanter : «Oh ! oh ! oh ! autrefois j'étais un vieillard, maintenant me voilà jeune homme.» (à suivre...)