Un homme avait une fille qu'il envoyait à l'école ; l'enfant étudiait jusqu'au soir et revenait ensuite à la maison. Un ange lui apparut et lui dit : «O enfant, que préfères-tu : devenir orpheline maintenant, ou bien attendre que tu aies grandi ?» Elle restait silencieuse. Chaque jour elle retournait à l'école, chaque jour l'ange lui répétait la même chose. Enfin, son père, la voyant tout abattue, voulut en connaître la cause. Sa fille lui répondit : «Un ange m'apparaît et me dit : ‘'O enfant, que préfères- tu : devenir orpheline maintenant, ou bien attendre que tu aies grandi ?''» Le père et la mère dirent à leur fille : «Quand tu le reverras, réponds-lui : «Il vaut mieux que tu me rendes orpheline maintenant. L'ange revint et demanda à la jeune fille : «Que préfères-tu devenir orpheline maintenant ou bien attendre que tu aies grandi ?» Elle lui répondit : «Je préfère que tu me rendes orpheline maintenant.» L'ange disparut et tua le père et la mère. Quand elle rentra à la maison, elle trouva ses parents morts, elle appela les gens du village et on les enterra. L'enfant alla demeurer chez un de ses oncles. Celui-ci avait un fils qu'il aimait tendrement ; un matin, il partit aux champs et dit à l'orpheline : «Prends soin de l'enfant. L'ange vint, tua l'enfant sur les bras de l'orpheline lui laissa un couteau dans les mains, la rendit muette et disparut. Quand le père et la mère de l'enfant revinrent, ils s'écrièrent : «Qui a tué l'enfant ?» Ils pleurèrent ; accablés de douleur, ils chassèrent l'innocente orpheline. Un autre de ses oncles la reçut dans sa maison. Il possédait un burnous de soie ; un matin, il alla aux champs avec sa femme et dit à l'orpheline : «Garde la maison.» L'ange vint, déchira le burnous, mit un couteau dans les mains de la jeune fille, la rendit muette et disparut : son oncle rentra au logis et la chassa. Elle alla chez un autre de ses oncles qui la prit chez lui ; un matin, il partit aux champs et dit à l'orpheline : «Garde la maison.» L'ange vint ; la maison renfermait des jarres d'huile, l'ange les brise, mit un bâton dans les mains de la jeune fille, la rendit muette et disparut. Son oncle revint et la chassa. Alors la pauvre orpheline se dirigea vers la campagne, elle rencontra un rocher sur lequel elle monta pour pleurer. Un homme sortit de dessous le rocher. «Qu'as-tu donc, ô jeune fille, pour pleurer ainsi ?» lui demanda-t-il. «Rien, répondit- elle ; si vous voulez me recueillir, je garderai vos troupeaux.» - «C'est bien», reprit celui-ci. L'orpheline gardait un troupeau de veaux. Son maître la suivit pour savoir à quoi elle s'occupait, si c'était une honnête ou une mauvaise fille. Il l'aperçut un livre en main et pleurant. Assurément elle était bonne, et il rentra à sa maison. Le lendemain, il lui dit : «Ne garde plus les troupeaux, mais prépare-nous le dîner et le souper, et tiens la maison en ordre.» Quelque temps après, il lui dit : «Mon fils t'épousera.» - «Non, répondit-elle, je ne me marierai jamais.» Son maître la pressa ; à la fin, elle consentit à la proposition. Son futur beau-père se mit en devoir de lui acheter en double des parures et des vêtements, elle lui demanda aussi une perle d'espérance. Alors il se dit secrètement : «Cette jeune fille nous tuera, moi et mon fils.» (à suivre...)