Cyclope n Dans tous les récits, le personnage monstrueux habite dans une grotte qu'il obstrue au moyen d'un tronc d'arbre ou d'un rocher. Une variété de personnages monstrueux, proche de l'ogre est du cyclope «apparaissent» dans quelques contes maghrébins, en Algérie et au Maroc. Au XIXe siècle, l'écrivain allemand, Frobenius, a rapporté dans son recueil de contes kabyles, un récit où il est question d'un géant qui ne possédait qu'un œil au milieu du front – d'ailleurs, il porte le nom de tit' u-qerru, littéralement : œil dans la tête. Comme les cyclopes de la fable grecque, celui-ci est anthropophage et vit dans une grotte. Il est berger et emmène paître ses moutons chaque jour. C'est ainsi qu'un jeune garçon égaré, le rencontre dans la forêt. Le cyclope l'invite à passer la nuit chez lui. le garçon a compris qu'il allait le dévorer mais, durant la nuit, alors qu'ils veillent, au coin du feu, il lui raconte des histoires et parvient à le faire dormir. Il prend alors un tison incandescent et le lui plonge dans l'œil. Le cyclope, devenu aveugle, le cherche, mais il ne parvient pas à l'attraper. Le jeune garçon tue alors un des moutons du cyclope, il le dépèce, revêt sa peau et parvient à échapper au monstre qui, en sortant ses bêtes, les palpe. Ce récit ressemble beaucoup au célèbre cyclope qu'Homère met en scène dans l'Odyssée. Ce cyclope, appelé Polyphème, est opposé à Ulysse, le fameux roi d'Ithaque, qui, revenant de la guerre de Troie s'est perdu dans les océans. Dans le récit d'Homère, Ulysse et ses hommes, poussés par la tempête, échouent sur l'île de Triacrie, la Sicile actuelle. Ils trouvent refuge dans une caverne, ignorant qu'ils s'agit de l'antre du cyclope Polyphème, fils de Poséidon, le dieu de la mer et de la nymphe Toosa. Il découvre Ulysse et ses compagnons et dévore plusieurs d'entre eux. Le rusé Ulysse parvient à l'enivrer et, une fois Polyphème plongé dans un profond sommeil, il chauffe à blanc un épieu acéré et le lui plonge dans son unique œil, le rendant ainsi aveugle. Le géant se réveille et se met à hurler de douleur, il tente, en vain, de se saisir des Grecs, qui parviennent à se réfugier dans les anfractuosités de la grotte. Au matin, au moment de conduire les bêtes au pâturage, le cyclope se met devant l'entrée de la caverne et palpe les moutons pour que Ulysse et ses compagnons ne les utilisent pas comme montures pour s'échapper. Mais le rusé grec a suggéré à ses amis de s'agripper aux ventres des bêtes. C'est ainsi qu'ils parviennent à s'échapper. Les rescapés se précipitent alors au rivage où le vent a poussé leur bateau : ils s'y précipitent et regagnent la mer. Homère a dû emprunter son récit aux légendes et mythes grecs anciens mais l'histoire de Polyphème est loin d'être spécifique à la Grèce, puisqu'on la retrouve dans d'autres contrées de la Méditerranée, y compris au Maghreb. Signalons que quatre récits analogues ont été relevés au Maghreb, plus précisément au Maroc : un de ces récits, recueilli dans le sud de ce pays, est en arabe, les trois autres en berbère. Les héros des aventures sont soit un saint – en l'occurrence, Sidi H'amed Ou Moussa –, soit un poète, qui affronte le monstre et arrive à le vaincre en lui crevant son unique œil. Dans tous les récits, le personnage monstrueux habitent dans une grotte qu'il obstrue au moyen d'un tronc d'arbre ou d'un rocher. Autre point commun, le «cyclope» maghrébin est, comme celui d'Homère, berger… Voici maintenant quelques contes algériens, mettant en scène des ogres et des cyclopes. (à suivre...)