Récit n Le Bus dans la ville est le titre du roman de Yahia Belaskri, paru aux éditions Apic, dans la collection Résonance. Ce récit – simple et léger – se présente comme une peinture réaliste et savoureuse d'une famille, d'un quartier et de toute une ville qui, à travers les souvenirs du narrateur, prend étonnamment corps et vie, l'instant d'un flash-back. Il décrit une galerie de personnages, authentiques, au caractère franc et à l'esprit vif et pertinent, des personnages ordinaires – qu'on peut rencontrer dans la vie quotidienne – et attachants, en dépit de la différence de leurs personnalités et de leurs rapports les uns aux autres, le récit met en scène autant de personnages que de personnalités : des professeurs, des poètes, des dramaturges, des utopistes, des révolutionnaires, des hardis, des lâches, des idoles, des effacés… «Chacun transporte un morceau de la ville, donne le goût de la vie ou succombe au désespoir», le tout donne en filigrane, les petites histoires des uns comme celles des autres, mais toutes illustrent la grande, celle de la ville dont elle est le principal protagoniste, et font écho avec elle. La ville se présente alors comme le théâtre de tant d'événements tantôt comiques tantôt tragiques, un théâtre où s'entremêlent avec beauté les délectations ainsi que les soubresauts des personnages que le narrateur nous présente et décrit d'une manière réaliste et dans une intimité saisissante. Le narrateur est seul, même s'il est dans un bus, entouré de passagers, qui traverse la ville. Dans sa solitude et son isolement intérieur, le narrateur, détaché et pensif, s'immerge dans son enfance, puis dans sa jeunesse. Au même moment où le bus traverse la ville, celle-ci est également traversée par le narrateur, par voie de réminiscences, mais dans le passé. Il traverse son enfance, sa jeunesse. Il se revoit, comme autrefois, enfant, puis jeune. Il revit ces instants avec sa famille, ses voisins et ses amis, d'enfance et de jeunesse, ainsi que ses premières amours. Il se revoit dans ce passé qu'il conjugue au présent à l'aide de la mémoire affective. Car cette ville dans laquelle il a grandi, renferme ces éléments et détails qui font que le narrateur se remémore son passé avec autant de sentiments que de mélancolie. Une forte nostalgie le saisit, parce que la ville a changé. Elle a beaucoup et profondément changé. Elle n'est plus celle qu'il a aimée et avec laquelle il a partagé son temps, ses secrets, ses joies et ses peines. Et en dépit de cela, malgré sa laideur et sa froideur, la ville reste belle et attachante, parce qu'elle se présente comme l'unique point de repère du narrateur. C'est par elle qu'il se rappelle, et c'est avec elle qu'il entretient, mais toujours par le souvenir, d'étroites relations, à la limite de l'intimité. Le Bus dans la ville, paru en France en 2008 aux éditions Vents d'ailleurs, est un récit chargé de sincérité et de poésie, un lyrisme marqué par un réalisme franc. C'est un récit certes bref et simple, mais vif, palpitant et attachant. C'est un récit exultant où «le temps s'amenuise entre réel et imaginaire, entre le temps des souvenirs et le maintenant retrouvé».