Bien entendu, il faut interpréter symboliquement les rêves de sidi Abderrahmane. Dans le premier rêve, relatif à la vision d'Abû Bakr qui lui parle en faisant la grimace, ce n'est pas seulement à cause de l'oignon que le saint a mangé, c'est aussi pour inciter à se purifier, au moment de dormir, à se débarrasser de toute impureté physique ou morale. Dans le rêve de la mer où on le pousse à nager, il est fait référence à son œuvre d'interprétation du Coran qu'il a entamée : œuvre très difficile mais qu'il doit mener à terme pour répondre à la demande de la communauté. Bien que porté vers le rêve et la méditation Sidi Abderrahmane est loin de faire partie de ces mystiques contemplateurs, totalement détachés du monde. Il s'est toujours intéressé aux affaires du monde et aux malheurs de ses contemporains, n'hésitant pas à prendre position quand les intérêts de la communauté étaient en jeu. C'est ainsi qu'il a adressé des admonestations (nâs'a'îh') aux tenants du pouvoir, les incitant à traiter avec ménagement leurs sujets, à ne pas exercer sur eux des pressions. Il va même jusqu'à les menacer des flammes de l'enfer s'ils persistent dans leurs erreurs. Il est vrai que sa notoriété et son influence lui permettaient d'agir de la sorte.