Résumé de la 1re partie n Une amitié tacite naît entre le garçon et le vieillard, son voisin d'en face... Le dimanche d'après, l'enfant enveloppa quelque chose dans un papier, sortit dans la rue, et accostant le vieux domestique qui faisait les commissions il lui dit : «Ecoute ! Veux-tu me faire plaisir et donner cela de ma part à ton maître ? J'ai deux soldats de plomb ; en voilà un ; je le lui envoie pour qu'il ait un peu de société ; je sais qu'il vit tellement isolé de tout le monde. Que c'est lamentable !» Le vieux domestique sourit, prit le papier et porta le soldat de plomb à son maître. Peu après, il vint trouver les parents , demandant si le petit garçon ne voulait pas venir rendre visite au vieux monsieur. Les parents donnèrent leur permission, et le petit partit pour la vieille maison. Les trompettes sculptées sur la porte avaient, ma foi, les joues plus bouffies que d'ordinaire, et si l'on avait bien prêté l'oreille on les aurait entendues qui soufflaient dans leurs instruments : «Schnetterendeng ! Ta-ra-ra-ta ! le voilà, le voilà, le petit schnetterendeng !» La grande porte s'ouvrit. Le vestibule était tout garni de vieux portraits de chevaliers revêtus de cuirasses, de châtelaines en robes de Damas et de brocart ; l'enfant crut entendre les cuirasses résonner et les robes rendre un léger froufrou. Il arriva à un grand escalier, avec une belle rampe en fer tout ouvragée et ornée de grosses boules de cuivre où l'on pouvait se mirer ; elles brillaient comme si l'on venait de les nettoyer pour fêter la visite du petit garçon, la première depuis tant d'années. Après avoir monté bien des marches, l'enfant aperçut, donnant sur une vaste cour, un grand balcon, mais les planches avaient des fentes et des trous en quantité ; elles étaient couvertes de mousse, d'herbe, de sedum et toute la cour et les murailles étaient de même vertes de plantes sauvages qui poussaient là sans que personne s'en occupât. Sur le balcon se trouvaient de grands pots de fleurs, en vieille et précieuse faïence ; ils avaient la forme de têtes fantastiques, à oreilles d'âne en guise d'anses ; il y poussait des plantes rares ; c'étaient des touffes de feuilles, sans presque aucune fleur. Il y avait là un pot d'œillet tout en verdure, et il chantait à voix basse : «Le vent m'a caressé, le soleil m'a donné une petite fleur, une petite fleur pour dimanche.» Ensuite, le petit garçon passa par une grande salle ; les murs étaient recouverts de cuir gaufré, à fleurs et arabesques toutes dorées, mais ternies par le temps. «La dorure passe, le cuir reste,» marmottaient les murailles. Puis, l'enfant fut conduit dans la chambre où se tenait le vieux monsieur, lequel l'accueillit avec un doux sourire, et lui dit : «Merci pour le soldat de plomb, mon petit ami, et merci encore de ce que tu es venu me voir.» Et les hauts fauteuils en chêne, les grandes armoires et les autres meubles en bois des îles craquaient, et disaient : «knick, knack !» Ce qui pouvait bien vouloir dire : «Bien le bonjour !» A la muraille pendait un tableau représentant une belle dame, jeune, au visage gracieux et avenant; elle était habillée d'une robe vaste et raide, tenue par des paniers ; ses cheveux étaient poudrés. De ses doux yeux, elle regardait l'enfant. «Qui cela peut-il donc être, dit-il. D'où vient cette belle madame ?» (à suivre...)