On devine que cette disparition a provoqué l'émoi dans les tribus environnantes. On se met à craindre Sidi Badahmane et on évite de le mettre en colère. Or, la vocation d'un saint n'est pas d'inspirer la terreur, mais la crainte de Dieu et l'application de ses préceptes. C'est pourquoi Sidi Badahmane tente de se rapprocher des tribus et de nouer avec elles des relations. C'est ainsi qu'il va dans le ksar de Charwin où vit une grande tribu zénète. Mais dès qu'on le voit arriver, les gens s'affolent. Des notables vont le retrouver et lui disent : «Sidi, nous reconnaissons ton pouvoir, mais nous ne voulons pas finir comme les gens d'Imaghyaz !» Le saint leur répond : «Si vous ne commettez pas d'atrocités comme ces gens et que vous vous acquittez de vos devoirs religieux, vous n'aurez rien à craindre. Ma baraka et celle de mes descendants s'étendront sur vous !» Puis, il demande du lait et de l'eau. Il les mélange et dit : «Le lait et l'eau vous représentent, vous et mes descendants. Pour les séparer ou les dresser les uns contre les autres, il faudrait séparer ce lait de cette eau !» C'est ainsi qu'il établit une alliance avec les gens de Charwin. Des six fils de Sidi Badahmane, cinq sont morts sans laisser de postérité. Un seul a eu des descendants.