Ce Commando Noir de parachutistes était dirigé par le lieutenant Guillaume. Le 21 mars, après leurs opérations au douar Mechmèche, le colonel Bigeard avait demandé des volontaires pour passer la nuit au maquis en contrepartie d'une promotion dans le grade et d'une prime très importante. Il y eut cinquante-huit volontaires. Cette opération de prestige visait, en fait, à démontrer à une délégation de sénateurs américains et français, de passage dans la région de Blida, qu'il n'y avait plus de combattants algériens en dehors de quelques bandes désorganisées de rebelles communistes. Par la même occasion, les autorités coloniales et l'armée française entendaient prouver à la population algérienne que la France était aussi bien maîtresse des maquis que des villes et des villages... Le Commando Noir des parachutistes du colonel Bigeard était composé d'éléments d'élite, qui sortaient des écoles de guerre les plus prestigieuses et étaient très expérimentés dans la guérilla, ayant déjà fait leurs preuves lors de la guerre d'Indochine. Cela était dû au fait qu'ils étaient bien camouflés, que les habitants du douar Mechmèche n'avaient pas remarqué leur présence. Ils avaient eu l'audace de passer la nuit au maquis, pas loin du douar et quasiment tout près de nous. Ils avaient réussi à tromper la vigilance des moussebiline et des habitants, qui s'étaient ainsi persuadés qu'ils étaient repartis vers leur caserne à Blida. Après notre victoire sur les paras, toute la population de la région de Tamesguida, Kahahla, Mouzaïa était en liesse, les visages étaient rayonnants, particulièrement dans le douar Mechmèche dont les habitants avaient beaucoup regretté le mauvais accueil qu'ils nous avaient fait la veille. Nous avons pu leur prouver ensuite que nous n'avions pas peur des soldats français. Dès le matin et ce, jusqu'au soir, les habitants de la région nous ont encouragés, les hommes avec leurs exhortations «Allâh yansarkoum yâ el-moudjâhidîne» (Dieu vous accorde la victoire, ô moudjahidine !), et les femmes avec leurs youyous ; quant aux enfants, ils entonnaient le chant patriotique (nachîd) Min Djibâlinâ (De nos Montagnes...) Tous pleuraient de joie, heureux d'avoir pu voir la défaite de l'armée française et d'avoir été vengés par les mains des moudjahidine, pour tout le mal que les paras leur avaient fait subir. Quant à la population française de Blida et des villes environnantes, surtout les gros colons et les militaires, ils étaient en deuil et pleuraient le commando de paras qui n'était plus revenu. Nous, les moudjahidine, étions grandement satisfaits d'avoir pu venger notre valeureux chahid Si Zoubir et les vingt-sept étudiants qui avaient trouvé la mort avec lui, ainsi que les civils blessés par le Commando Noir de paras qui avait semé la terreur dans la région de Médéa, Blida, Mouzaïa, La Chiffa, El Affroun... De plus, la population algérienne éprouvait encore plus de joie de savoir que nous avions été la cause de la liquidation des deux traîtres sanguinaires Kiouaz et Bengalal, qui avaient massacré des civils musulmans. (à suivre...)