Les unités de l'A.L.N. devaient exécuter des actions armées dans toutes les villes, les villages, attaquer les lieux de casernements des militaires français, saboter les voies de communications (routes et ponts), les poteaux téléphoniques et les postes électriques, saccager les récoltes et incendier les fermes appartenant aux colons. Cette action unifiée devait s'étendre de la frontière tunisienne jusqu'à la frontière marocaine, et du nord jusqu'au sud, afin de démontrer à l'armée française que l'A.L.N. n'était pas un mythe, que ses soldats de la liberté existaient bel et bien et qu'ils étaient en mesure de les attaquer partout où ils se trouvaient et à n'importe quel moment. Par cette action générale, nous avons prouvé au colonialisme français, à ses soldats que nous étions là, que nous nous battions à n'importe quel prix pour la liberté et l'indépendance de ce pays qui était le nôtre l'Algérie. Les neuf groupes formant la Katiba (compagnie) El Hamdania devaient attaquer les villes de Cherchell, Sidi Ghilès (Novi), Hadjret Enous (Fontaine-du-Génie), Gouraya, Beni Haoua (Francis-Gamier), Damous (Dupleix), Menacer (Marceau), Sidi Amar (Zurich), ainsi qu'un poste militaire de la région de Larhat. Nous nous trouvions dans les monts du Zaccar, lorsque Si Moussa Kellouaz El Bourachdi, le chef de la Katiba, avait longuement entrepris de nous expliquer le but précis et l'extrême importance politique de la mission militaire que nous étions chargés d'accomplir. Nous allions devoir commémorer dans une ambiance de feu, de fer et de sang, ces deux grandes dates de la révolution armée qu'étaient pour le peuple algérien le 20 août 1955 et le 20 août 1956. Après nous avoir donné ses instructions et fait des recommandations très judicieuses pour la réussite de cette opération d'envergure, Si Moussa nous a répartis en neuf groupes pour attaquer toutes les villes de la Mitidja et du littoral que nous avons mentionnées plus haut. Nous avions laissé derrière nous, dans les monts du Zaccar, une dizaine de moudjahidine auxquels avaient été confiés les deux fusils-mitrailleurs FM Bar et la mitrailleuse 30 américaine. Car les armes lourdes n'étaient pas du tout recommandées dans des actions comme celles que nous allions exécuter et qui exigeaient de nous une rapidité dans le déplacement, d'un point à l'autre de notre vaste périmètre d'action. Tous les groupes devaient attaquer les objectifs qui leur avaient été désignés le 20 août 1957, exactement à la même heure — 20 heures. Il fallait ensuite être au rassemblement général des effectifs de la compagnie prévu pour le lendemain 21 août, entre 4 heures et 5 heures du matin, dans les monts du Zaccar où nos compagnons nous attendraient en veillant aux armes lourdes. Je me trouvais dans le groupe qui devait attaquer l'école des officiers de la ville de Cherchell. Commandé par Si Ahmed Kellassi, l'adjoint de Si Moussa, notre groupe comptait onze moudjahidine, en majorité enfants de la ville de Cherchell : Hamid Hakam, Saïdji, Mohamed Lahbouchi et son frère Ahmed, etc. Le 19 août 1957, veille du jour «J», nous nous sommes empressés de nous mettre en marche, dès la nuit tombée, afin d'arriver selon l'horaire fixé à proximité de nos objectifs. (à suivre...)