Epreuve n Outre les tâches ménagères, la femme rurale contribue à beaucoup d'activités, dont l'entretien de son cheptel et la transformation des produits animaliers et agricoles. Telle la fourmi de La Fontaine qui pense déjà en été à l'hiver, la femme rurale s'attelle aux préparatifs de ses provisions longtemps à l'avance : préparatifs nommés «aoula» dans nos contrées et où cette coutume est d'usage depuis des temps immémoriaux. Très dynamique, elle possède le même rythme de travail, si ce n'est plus, que la femme citadine active. Au moment où cette dernière se facilite au maximum la tâche tout en s'inspirant des programmes télévisés spécialisés et diffusés sur les chaînes satellitaires, la femme rurale s'attache, elle, à la préparation de mets traditionnels. Lors des fêtes religieuses et du ramadan, elle redouble d'efforts tout en faisant face à la rudesse du climat, et ce pour assurer une réserve conséquente en fruits et légumes secs sans oublier les différentes céréales indispensables à la confection des mets traditionnels et du pain. La présidente de l'association Ikram de la femme rurale de la wilaya de Tipasa, Fouzia Rezigue, précise que la femme rurale du mont Chenois et d'ailleurs prépare ses plats à partir de sa propre production. Parmi ces plats, «h'chich kouirate», appelé aussi «mermez», «elhamdha», un pain d'orge cuit dans un four en argile fabriqué la plupart du temps par ses soins. Notre interlocutrice, elle, nous avoue avoir déjà fait sa réserve de fève et d'orge. Alors que sa réserve en produits alimentaires et céréales de base est complète, la femme rurale se lève avant l'aube pour se préparer à sortir cueillir des légumes de saison nécessaires au menu du jour. Puis, elle nettoie son étable après son retour d'une balade avec son cheptel (vaches, moutons, brebis ou chèvres). L'été, particulièrement lors de fortes chaleurs, elle procède au séchage des amandes et des figues. A Ouled Gacem (Bouira), el hadja Fatma raconte qu'elle prépare, elle-même, son «khmir», un pain traditionnel, pour le cuire sur du bois qu'elle ramène de la forêt et s'approvisionne en eau dans un puits situé à plusieurs mètres de chez elle. En effet, lors de nos déplacements dans plusieurs localités nous avons constaté que les tâches les plus ardues, tel le travail dans les champs, ont peu à peu été abandonnées par quelques femmes rurales, notamment les plus jeunes. D'ailleurs, la majorité d'entre les jeunes avec lesquelles nous nous sommes entretenues n'ont pas le droit de mettre le nez à l'extérieur de leur domicile. Elles se cantonnent aux tâches ménagères, à la confection du pain traditionnel, «kesra» ou «ftir», en compagnie de leurs mères et qu'elles cuisent ensuite dans des fours en argile ainsi qu'à la préparation du couscous, appelé «seksou», à base de semoule, de gland ou de blé. Et sans déroger à la règle, après une indispensable petite sieste, elles s'attellent à cuisiner. Nombreuses sont celles qui se plaignent de la pauvreté et de leurs conditions de vie, intolérables, à l'image de cet oued traversant le douar Aïfer (Menaceur), à Tamloul, lequel, lors de ses crues hivernales, coupe l'accès à l'école. Et ce sont les petites filles qui en pâtissent le plus. Leurs parents finissent, la plupart du temps par les cloîtrer à la maison, refusant catégoriquement de les voir s'en aller à l'école dans des conditions aussi difficiles. D'autres tentent en vain de surpasser ces conditions. Et d'autres, enfin, histoire de leur faire oublier ce mauvais passage, les initient, en attendant la décrue, à de petites activités comme faire fonctionner la meule ou le crochet.