Contrainte n Aussi «cruelles» qu'elles puissent paraître, beaucoup de sages-femmes exerçant aussi bien dans le secteur public que dans le privé, travaillent sous une énorme pression. L'Algérie enregistre en moyenne 8 000 accouchements par an assistés par 800 accoucheuses. L'équation de ces deux chiffres démontre qu'une seule sage femme assure en moyenne 1 000 accouchements annuellement. Elle dépasse ainsi de loin la norme définie par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et qui est de 175 accouchements par sage-femme par an. La sage-femme dans notre pays assure donc environ la prestation de 10 sages-femmes. Ce qui est synonyme d'une énorme pression de travail. Il demeure que cette moyenne annoncée par l'Unsfa est plutôt approximative, vu que dans certains cas ce nombre peut être supérieur surtout si l'équipe de travail est peu nombreuse. Cette charge de travail, expliquerait peut-être en partie la mauvaise humeur qu'on prête aux sages-femmes. «Cruelles», «méchantes»... sont, entre autres qualificatifs, qu'on leur colle souvent. Avec 1 000 accouchements par an, un espace de réception insuffisant et des moyens dérisoires, force est de reconnaître qu'être toujours souriante relèverait du rêve. «Je me suis tapé 70 accouchements en 36 heures», proteste l'une de ces accoucheuses exerçant dans une maternité à Alger. Cette situation est dictée par le manque flagrant de personnel dans ces structures de santé, entre autres de sages-femmes. En effet, de l'avis de tous, cette profession souffre d'une réelle déperdition : les aînées sont pressées de quitter et les jeunes, elles, sont peu séduites par la profession et préfèrent changer d'activité. Qu'est-ce qui pourrait bien provoquer une telle hémorragie dans un corps de métier pourtant indispensable, vital. Les sages-femmes que nous avons abordées insistent sur la mauvaise prise en charge. «Notre métier exige de nombreux sacrifices sans contrepartie. Nous sommes mal rémunérées», nous dit une sage-femme exerçant dans une maternité à Tizi Ouzou depuis une dizaine d'années. En nombre insuffisant, très peu formées à la manipulation de certains matériels et travaillant souvent dans des structures de santé surchargées par manque de places, les sages-femmes se trouvent face à une importante charge de travail, ce qui influe inévitablement sur la qualité de leurs prestations. Autre élément qui alourdit la tâche de ces praticiennes, l'absence de spécialistes tels les gynécologues et les pédiatres au niveau des maternités, en particulier dans les zones rurales. Par ailleurs, la situation des sages-femmes dans le secteur privé ne semble pas meilleure. Beaucoup ont estimé que dans de nombreuses cliniques privées, les sages-femmes sont exploitées et se trouvent alors «ligotées par rapport à leurs actes». «Même les prestations qu'on donne à la sage-femme sont minimes par rapport au paramédical qui travaille avec elle dans la même clinique.»