Résumé de la 4e partie La police a dépisté Susuki et ses camarades. Ces derniers se sentant encerclés ont tiré et la police a riposté. L?officier embouche son porte-voix, et répète plusieurs fois en direction de la falaise : «Lieutenant Susuki Tanaguchi, ne tirez pas ! Votre s?ur vient vous voir !» Portant la petite tente, s?accrochant aux arbustes ruisselants, Mitsuko grimpe le sentier que les policiers lui ont indiqué. De temps en temps elle lève la tête et scrute le haut de la falaise. «Susuki, tu es là ?? C?est moi, Mitsuko !» Elle se hisse péniblement dans les derniers mètres et finit par émerger de la jungle à quatre pattes, complètement trempée. Au moment où elle cherche à saisir le tronc d?un arbuste pour se hisser sur l?arête de la falaise, elle ne peut retenir un cri. Une main vient de se glisser sous son aisselle. Elle lève la tête et reconnaît son frère. Il a toujours ses mêmes yeux calmes, cette mâchoire large, énergique. Les voici debout, face à face. Il est affreusement maigre, le visage ravagé, à bout de résistance. L?élégant employé d?import-export est devenu un animal traqué. Sans arrêt, son regard se porte à droite et à gauche, son oreille épie les bruits au bas de la falaise. Mais Mitsuko constate avec soulagement qu?il porte toujours son uniforme : usé, rapiécé, méconnaissable, c?est tout de même un uniforme. «Je suis toujours en mission, Mitsuko? Je suis toujours soldat. ? Mais tu vois bien que tu vas mourir pour rien ! ? Je sais. ? Mais le Japon a signé sa reddition depuis huit ans ! ? Je sais? J?ai lu les tracts et les journaux largués dans la jungle par les avions.» Susuki explique à sa s?ur qu?il s?est battu d?abord parce qu?il fallait remplir sa mission ; parce que pour lui les combats n?était pas finis, que d?autres Japonais qui incarnaient les vertus ancestrales du Japon se battaient encore. Puis il s?est battu parce qu?une paix imposée par l?ennemi n?est pas vraiment la paix et ne résout pas les problèmes ; parce que le Japon voudra certainement recouvrer sa liberté un jour et qu?il faudra des gens comme lui pour ouvrir la voie de cette liberté. Maintenant, il se bat parce qu?il n?a plus d?estime pour les hommes. Il a compris qu?il est abandonné, après avoir été sacrifié. Il est entouré d?ennemis qui veulent sa mort, qui le traquent et dont il refuse d?implorer la pitié. «Mais l?officier qui t?a ordonné de résister même après la paix, c?est maintenant un employé de librairie.» Pendant des heures, sous la tente qu?ils ont dressée pour échapper à la pluie équatoriale, Mitsuko essaie en vain de convaincre son frère. Hâve, fiévreux, ruisselant de sueur, il reste enfermé dans son désespoir farouche. C?est alors qu?elle se souvient des paroles du vieux peintre. Elle fouille dans la poche de son battle-dress et sort une photo qu?elle tend à Susuki. C?est le petit jardin bien ratissé de leurs parents, devant le cerisier. «Tu vois, en ce moment, il est en fleur? Il a fait froid cet hiver, mais Dieu a tenu à ce que les cerisiers fleurissent quand même ce printemps, comme tous les printemps? Et pour nous tous.» Mitsuko s?avance quelques instants plus tard au devant des policiers philippins. Par précaution, Mitsuko s?est serrée contre son frère, pour éviter qu?une balle ne l?abatte à la dernière seconde. Trois jours plus tard, la famille Tanaguchi était à nouveau réunie devant le cerisier en fleur.