Constat n Le chômage, la cherté de la vie et le sentiment d'être laissés-pour-compte dans des régions défavorisées, sont à l'origine d'une récente flambée de mécontentement dans le centre-ouest de la Tunisie où des affrontements ont opposé manifestants et forces de l'ordre. Le taux de chômage élevé des diplômés universitaires, la hausse des prix des matières premières et le recours au secteur agricole seulement sont à l'origine des troubles», a estimé le président de la section régionale de la Ligue des droits de l'Homme, Raouf Nsiri. La région de Sidi Bouzid à 265 km au sud de Tunis est en proie à des troubles sociaux depuis le 19 décembre, à la suite de la tentative de suicide d'un jeune diplômé de l'université, vendeur sans permis de fruits et légumes qui s'était fait confisquer sa marchandise par la police municipale. Désespéré, le jeune homme s'était aspergé d'essence pour s'immoler par le feu. Il a survécu mais se trouve dans un état critique. Cinq jours plus tard un autre jeune a mis fin à sa vie en s'électrocutant au contact de câbles électriques. «Le chômage est la conséquence immédiate avec tout ce qui peut s'ensuivre», a expliqué Touhami Héni, responsable régional de l'Union générale des travailleurs tunisiens. Le chômage des jeunes diplômés de l'université constitue un fléau en Tunisie contre lequel le gouvernement a été mis en garde par les institutions internationales dont le Fonds monétaire international. Son taux atteindrait le double du taux de chômage global, estimé officiellement à 14%. «La défaillance du modèle de développement, qui a provoqué une inégalité entre les régions, a débouché sur le fait que 90% de projets sont localisés dans les régions côtières et 10% dans les régions intérieures», affirme l'opposant Rachid Khéchana. Selon lui, cette «disparité s'est accentuée avec l'arrivée sur le marché de travail de plusieurs milliers de diplômés originaires de ces régions enclavées». La population de Sidi Bouzid vit essentiellement d'élevage de bétail et du commerce informel. Cette région est limitrophe de Gafsa, une zone minière qui a connu en 2008 des protestations similaires contre le chômage et la cherté de la vie. Des affrontements avaient également eu lieu en août dernier, à Ben Guerdane, à cause de restrictions apportées par la Libye au commerce informel vital pour les habitants de cette région. Face à la vague de manifestations dans la région de Sidi Bouzid, le gouvernement a d'abord dénoncé une manipulation à des fins politiques «malsaines» avant de prendre des mesures urgentes en faveur de la région. Ces mesures annoncées par le ministre du Développement, Mohamed Nouri Jouini, portent sur la création d'emplois et des projets pour un montant de 15 millions de dinars (7,86 millions d'euros). Les manifestations se sont néanmoins poursuivies alors que des rassemblements de solidarité étaient organisés dans plusieurs villes de Tunisie et à Paris. «Le travail est un droit légitime pour toute personne mais sa revendication ne se fait pas par la violence», a souligné M. Jouini. Dans le même sens, le parti social libéral (PSL, proche du gouvernement) a dénoncé le recours à la violence, préconisant le dialogue pour faire avancer les revendications sociales.