Crise n Les partisans de Laurent Gbagbo ont, appelé hier, à prendre d'assaut le quartier général de son rival Alassane Ouattara à Abidjan, protégé par les Casques bleus de la mission onusienne, et qui a dénoncé les «appels à la haine» à son encontre. Le leader des «jeunes patriotes» pro-Gbagbo a signifié que l'heure de l'affrontement était proche, à l'issue d'un mois de crise née à la suite de la présidentielle du 28 novembre. «Au-delà du 1er janvier, moi, Charles Blé Goudé et les jeunes de Côte d'Ivoire, allons libérer le Golf Hôtel les mains nues», a-t-il lancé devant quelques milliers de partisans. Reconnu Président sur le plan international, Alassane Ouattara est retranché avec son gouvernement dans cet hôtel de luxe soumis à un blocus des forces pro-Gbagbo. Le «Golf» est protégé par des éléments de l'ex-rébellion alliée à Ouattara et par les 800 Casques bleus de la mission onusienne Onuci. Au lendemain d'une attaque contre un convoi de l'Onuci, au cours de laquelle un Casque bleu a été blessé, l'ONU a accusé la télévision d'Etat RTI, contrôlée par le régime Gbagbo, d'«appels à la haine» contre sa force de quelque 9 000 hommes. Alors que la crise post-électorale a été marquée par des violences meurtrières, l'ambassadeur nommé par Ouattara aux Nations unies, Youssouf Bamba, a tiré la sonnette d'alarme. «Nous sommes à deux doigts d'un génocide. Il faut faire quelque chose», a-t-il exhorté, demandant à l'Onuci de protéger les civils. Au moins 173 personnes ont été tuées, selon l'ONU, autour de la mi-décembre. Le gouvernement Gbagbo a évoqué un bilan de 53 morts depuis fin novembre. Dans ce contexte intérieur très tendu, l'Afrique de l'Ouest a cependant privilégié la négociation, même si elle se préparait à une éventuelle opération militaire pour chasser Gbagbo. «Nous discutons toujours», a déclaré le chef de l'Etat nigérian Goodluck Jonathan, président en exercice de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao). Mandatés par l'organisation régionale, les Présidents béninois, Boni Yayi, sierra-léonais, Ernest Koroma, et capverdien, Pedro Pires, étaient partis voir mardi Gbagbo à Abidjan pour lui adresser un ultimatum : céder le pouvoir ou prendre le risque d'une intervention armée ouest-africaine. Les émissaires «y retournent le 3 janvier», a annoncé Jonathan, après un entretien avec Koroma et Pires dans la capitale fédérale nigériane Abuja. «Quand il y a une dispute, c'est le dialogue qui résout tous les différends. Ce dialogue est en cours», a expliqué le président Jonathan. Une intervention militaire «semble, heureusement, écartée pour le moment», a déclaré le secrétaire d'Etat cap-verdien aux Affaires étrangères. L'usage de la force restait toutefois possible, puisque les chefs d'état-major des pays de la région se sont réunis mardi et mercredi à Abuja pour évoquer le dossier ivoirien. La réunion était consacrée à «la question de la logistique». «La Cedeao souhaite dépêcher une force de 2 000 à 3 000 hommes», a indiqué une source diplomatique, tout en s'interrogeant sur sa capacité à y arriver. «L'option militaire reste sur la table», en a conclu le porte-parole du gouvernement Ouattara.