Projection n Voyage à Alger, projeté en compétition pour l'Etalon d'or de Yennenga dans le cadre du Fespaco à Ougadougou, relate le combat d'une Algérienne contre l'injustice et l'abus de pouvoir. Il s'agit d'une véritable histoire, celle de la mère du réalisateur Adelkrim Bahloul. A travers sa mère, confrontée après l'indépendance de l'Algérie, à «un haut responsable algérien voulant la spolier de son bien», Adelkrim Bahloul a voulu, aussi, rendre hommage aux Algériennes qui se battent. Maghnia, incarnée par la comédienne Samia Meziane, veuve de chahid, illettrée, pauvre et sans soutien, se bat comme une tigresse contre un haut fonctionnaire qui veut la spolier de son bien : une maison offerte par un colon à son départ d'Algérie après l'indépendance. Cette femme courageuse et intransigeante est pour le réalisateur le symbole de «celles qui se sont battues et continuent à se battre». «Il existe des milliers de Maghniates», a-t-il affirmé, tout en déplorant «le peu de reconnaissance» que la société témoigne à ces femmes. «Je ne supporte pas le sort réservé aux femmes dans les sociétés arabes», s'est indigné le cinéaste pour qui «les sociétés arabes, en s'entêtant à écarter les femmes des affaires publiques, marchent sur une seule jambe». L'auteur de Voyage à Alger avoue, aussi, qu'il écrit et réalise «par amour pour sa mère», une femme qui a su concilier tendresse et force de caractère, étant, pour ses enfants, «la mère et le père» à la fois. «C'est (tout simplement) pour elle que je fais du cinéma», dit-il, contenant mal son émotion. La plupart des scènes ont été tournées à Saïda, ville natale du cinéaste, entre une ferme appartenant à ses parents et une grande maison (sujet du litige dans le film), propriété d'une parente lointaine. La majorité des comédiens sont aussi de sa famille. Ce choix s'est imposé en raison du manque des moyens financiers, a avoué le réalisateur, précisant qu'il a préféré investir un budget qui aurait servi à la location de studio de tournage ou de décor, dans tout ce qui est technique. Le casting du film, réussi selon les critiques, incluait au départ Souad Massi comme actrice principale. «Le choix de Samia Meziane s'est décidé par la suite, après le désistement de la chanteuse prise par un agenda trop chargé.» Les circonstances ont révélé Samia Meziane, une comédienne de talent. Sans Samia Meziane, le film aurait été différent. «C'est un génie de l'art dramatique», répétait-il. Deux ans après sa finalisation, Voyage à Alger, n'est pas encore sorti en salle en Algérie, l'Office national de la culture et de l'information (Onci) l'ayant annoncé en avant-première récemment, avant de l'annuler. Par ailleurs, Abdelkrim Bahloul prépare un nouveau long métrage sur Mohamed Dib et la trilogie qui a fait sa célébrité, L'Incendie. Le scénario a été achevé, les autorisations signées et le financement décroché, a indiqué le cinéaste qui ne compte pas lancer le tournage avant juillet prochain, soucieux de produire une «œuvre de qualité», selon ses propres dires. Des critiques, rencontrés après la projection du film, le placent parmi ceux qui «peuvent décrocher l'Etalon d'or de Yennenga». Ainsi, l'accent mis sur les personnages «simples» du peuple, une femme et ses jeunes enfants, dans le long métrage de fiction algérien en compétition officielle au Fespaco, Voyage à Alger, peut lui rapporter l'Etalon d'or de Yennenga, a estimé l'invité d'honneur de cette 22e édition, Elikia M'bokolo, lundi, en marge de la projection du film. Questionné sur les chances du film de décrocher la distinction suprême du Fespaco, cet historien congolais, spécialisé de l'Afrique, a considéré que l'accent mis sur des personnages simples, une femme et ses enfants, «peut émouvoir le jury». L'Algérie mise, dans sa participation à la 22e biennale du Fespaco, sur le long métrage de Bahloul, a-t-on confié auprès de la délégation algérienne du ministère de la Culture. Questionné sur les films figurant sur la liste des favoris après 4 jours de projections, Elikia M'bokolo a estimé que «le choix sera difficile, vu le nombre de beaux films, dont Voyage à Alger, à cette 22e biennale», a-t-il noté. Le réalisateur espère partir avec un prix, mais considère sa participation à la sélection officielle comme une victoire en soi.