Sort n Quinze siècles après sa création, La Casbah vit au quotidien, impuissante, un désastre menaçant son existence. Jadis «cité modèle» de la rive orientale de la Méditerranée, la construction de La Casbah, dont l'appellation signifie «forteresse», remonte à 1516 lorsque le corsaire turque Kheïreddine Barberousse décide d'installer sa capitale à Alger. La simple évocation du nom de ce personnage mythique nous renvoie automatiquement à l'histoire de ce bout de terrain qui, pour son emplacement idéal, attirait les grandes puissances de l'époque, parties alors à la conquête de nouvelles terres pour renforcer leur hégémonie. L'archipel fut occupé par un comptoir phénicien. Les Romains ont suivi. Ils y ont implanté les premiers remparts, tracé le grand cardo (circulation Est-Ouest, actuelles rues Bab-Azzoun et Bab El-Oued) et le decumanus (rue de la Marine). Au Xe siècle, les Hafçid fondent El-Djazaïr, les Turcs chassent les Espagnols, rattachent les îles à la ville, et créent le port. Kheïreddine en fait une ville fortifiée en construisant d'imposants remparts, dotés de six portes assurant la liaison entre la vieille ville, le port et le reste du pays. La ville prospère sur fond d'une combinaison entre la force militaire et le développement du commerce jusqu'à 1830 avec l'invasion française. Alors, de nombreux joyaux architecturaux du génie turc s'écroulent sous les bombardements de l'armée française. Aux alentours de 1920, naît un véritable intérêt pour la sauvegarde de la vieille ville. Toutefois, le caractère compliqué et mystérieux de la médina, notamment ses ‘znikat', ses rues tortueuses et la facilité des liaisons que seuls ses natifs maîtrisent, ont été d'un grand apport pour les moudjahidine lors de la Guerre de Libération. Des dirigeants de la Révolution algérienne avaient décidé de siéger dans la Casbah parce qu'ils étaient persuadés que la capitale était propice à la clandestinité totale, avec ses «planques», ses «caches» multiples, ses nombreux agents de liaison fondus dans la masse. Et puis résider à la Casbah, c'était aussi être au cœur de l'Algérie pour y mener la guérilla urbaine. La Casbah a été le pivot de la Bataille d'Alger en 1957. Malgré cela, l'Indépendance de l'Algérie n'a pas vraiment profité à la vieille ville. Aux premières décennies après l'Indépendance, on y rencontrait une activité touristique prometteuse. Aujourd'hui, malgré les différents programmes visant sa restauration, la Casbah assiste impuissante à sa dégradation progressive. Une situation engendrée par le laisser-aller des pouvoirs publics, qui ne suivent pas les chantiers engagés, et les habitants, qui ne se soucient pas de l'entretien de leurs maisons, surtout que la manière dont ces dernières sont construites, accolées les unes aux autres, favorise les ruines en cascade.