Résumé de la 41e partie n Au procès qui s'ouvre en mai 1896, l'avocat de Beck ne peut interroger l'expert graphologue sur les écrits attribués à son client. En n'évoquant pas l'année 1877, l'avocat Gill ne peut donc produire les témoignages des hommes et des femmes qui soutiennent que Adolf Beck, en 1877, ne se trouvait pas en Angleterre, mais en Amérique du Sud. La défense est ainsi privée de l'occasion de prouver l'innocence de son client. L'accusation va également perdre un atout, puisqu'elle ne pourra pas, à cause de la même loi, produire les dépositions de ses deux principaux témoins : les policiers Spurrel et Redstone qui, dix-neuf ans plus tôt, avaient procédé à l'arrestation de John Smith. Les deux hommes ont déclaré, sous serment, que Smith et Beck sont le même homme. Mais en fait, le procureur Avery peut se passer du témoignage des deux hommes, dans la mesure où celui des victimes de Beck suffit largement. Sur les vingt femmes que le prévenu aurait escroquées, dix se présentent à la barre. A chacune, on posera la même question. — Reconnaissez-vous en Adolf Beck, ici présent, l'homme qui a abusé de votre confiance. — Oui, disent-elles. Cependant deux d'entre elles vont émettre des réserves. Ainsi Annie Townsend dira que son voleur avait l'accent américain, ce qui n'est pas le cas de Beck, et Ottilie Meissonnier, qui avait tout déclenché, révélera que l'homme qui l'a escroquée avait une cicatrice sous l'oreille droite. — vous en êtes sûre ? — oui, il me l'a montrée ! — pouvez-vous la reconnaître ? — oui, sans problème ! L'avocat Gill lui demande de montrer cette cicatrice. Elle s'approche de l'accusé mais s'étonne de ne pas trouver de cicatrice. — Je ne comprends pas, dit-elle. Mais ces réserves ne vont pas empêcher le tribunal de prononcer la sentence : sept ans de prison ferme. «Je suis innocent ! s'écrie Beck, Dieu sait que je suis innocent !» Son cri ne sera pas entendu et il est emmené en prison. Comble de l'humiliation, on lui affecte le même matricule qu'à smith, dix-neuf ans plus tôt : le numéro D 523, auquel on ajoute la lettre W, pour indiquer que c'est un repris de justice. De 1896 à 1901, Beck va déposer dix demandes de révision de procès. En l'absence de cour d'appel en Angleterre, il ne pouvait user d'un autre moyen. Son avocat se démène pour obtenir le dossier de Smith. On le lui refuse mais un employé du ministère de l'intérieur peut le compulser et découvre que Smith était circoncis, étant juif. Or Beck n'est pas juif et n'est pas circoncis. On demande au juge Fulton d'intervenir sur ce point : il veut bien croire que Beck n'est pas Smith, mais il persiste, sur la foi du témoignage de ses victimes, qu'il est un escroc. Il consent quand même à le mettre en liberté surveillée. Sorti de prison, Beck va dépenser ce qu'il lui reste d'argent pour prouver son innocence. (A suivre...)