Résumé de la 2e partie n Jeannot, le lapin, est heureux dans cette colonie où tout le monde semble l'avoir apprivoisé... Un soir, alors que les petites fées riaient de ses espiègleries, Monsieur le directeur montra sa silhouette massive sur le terrain de jeux. Avait-il eu vent de nos cabrioles et de l'existence d'un nouveau colon quelque peu différent ? Sans doute, car tout le monde en parlait. Les cuisinières soupiraient entre elles : «Une bien belle bête ! Un bon civet ou un bon pâté pour la première qui saura l'attraper… Quand les enfants seront partis, bien sûr !» Le maître des lieux fit mine de chercher quelqu'un, aperçut les six petites fées, le visage défait, qui faisaient barrage devant le carton. Malheur ! Jeannot se baladait tranquillement sur le terrain de foot, plus visible qu'un ballon ! Les fées étaient vertes, j'étais rouge, le ciel était bleu, le temps était rose suspendu, et se teintait de gris. L'homme resta neutre en s'étirant la moustache, et s'en fut sans dire un mot, comme s'il n'avait rien vu. Il se contenta de m'appeler avant la fin du séjour, j'attendais un verdict, mais il me dit après quelques compliments : «Tu vas ramener les enfants à Paris à la fin du mois, tu seras chef de convoi ! — Pas de problème, je devrais savoir faire ça !» J'attendais une allusion à notre cher Jeannot, mais rien… pas même un mot ! «Si ça se trouve, Jeannot sera tué quant on va partir ! dit tristement ma fée Ecureuil — Peut-être pas, il va rester en liberté, espéra la fée Chocolat. — Il aura toute l'île pour lui ! renchérit la Brune aux yeux coquins — Il trouvera un jardin avec plein de légumes, des fleurs et du thym, reprit la fée Abricot. — Il sera heureux ? rêva Brin de paille. — Il trouvera une copine et aura des bébés lapins, continua Boucles d'or». Nous chantions Colchiques dans les prés et Ce n'est qu'un au-revoir, jusqu'au dernier soir ? dans le ciel orangé de cette fin d'été. Jeannot écoutait et quelques larmes de fées perlèrent sur son doux pelage. «Adieu Jeannot, soit heureux sur l'île, et peut-être à l'année prochaine ! Tu nous présenteras ta famille !» Dans ce petit matin clair et brumeux de ce 31 août, je pris la tête de la petite troupe nostalgique. «L'Acadie» fit entendre sa sirène sourde aux accents maritimes. Les enfants de banlieue basanés et grandis grimpèrent à son bord, l'œil humide et la curiosité en berne, encore plus tristes et plus heureux qu'à l'aller. Pour nous dire «au revoir» notre ami complice lança des pétales de fleurs qui s'éparpillèrent au fil de l'eau, et l'hymne aux adieux se fit entendre, ritournelle magique en ineffaçable souvenir. «L'Acadie» quitta le port, pendant que les amours enfantines pleuraient à chaudes larmes, un morceau de papier quadrillé rempli d'adresses postales au creux de la main. Et oui, il n'y avait pas de téléphone portable, ni de boîte émail à l'époque ! Pour mes six petites fées une seule pensée trottinait dans leur tête : Jeannot, copain de l'île. Surtout ne pas penser qu'il finira en pâté ! C'est alors que du grand sac à dos de Boucle d'or, pointèrent deux longues oreilles roses et blanches ! «Chut ! Taisez-vous ! Il sera sage ! Vous inquiétez pas, mes parents sont gentils et végétariens ! Ils aiment bien les animaux, ils seront contents !»