CD, DVD : l'alternative Dégradation n Datant de l'époque coloniale, les salles de cinéma en Algérie, du moins celles qui existent encore, connaissent un laisser-aller handicapant. Tradition familiale autrefois, la fréquentation des salles de cinéma se réduit de plus en plus. En effet, ces espaces de culture et d'échange étaient, dans les années 1960 et 1970, voire jusqu'à 1980, l'ultime refuge pour des jeunes sans occupation pour la plupart. Se rendre au cinéma ne suscitait d'ailleurs pas d'étonnement. Au lendemain de l'Indépendance, le parc national comptait quelque 700 salles, dont 400 à Alger. Ce nombre se limitera, en 2000, à quelque 300 salles pour ne pas dépasser 318 salles actuellement. Presque plus de salles «noires», encore moins de cinéphiles, la situation actuelle suscite l'appréhension des gens du domaine, vu que l'exploitation des films dans ces salles influe sur la production cinématographique. Cette situation résulte de la conjugaison de plusieurs facteurs. Crise sécuritaire, changement des mœurs sociales, ouverture sur le monde de l'électronique et du multimédia, carence dans la production et la distribution sont, entre autres les raisons avancées. Dès 1964, les salles de cinéma, surtout celles équipées en 35 mm, sont nationalisées, alors que quelques années plus tard, en 1968, la distribution des films sera sous le monopole de l'Office national pour le commerce et l'industrie cinématographique (Oncic). Ce qui mettra un terme aux sociétés de distribution, qu'elles soient françaises ou américaines. Cet office tentera, des années durant, d'approvisionner en films des salles de cinéma qui tournent tant bien que mal. Cela ne durera pas trop longtemps, puisque l'Oncic, en tant qu'office de distribution, sera dissous en 1984. En outre, la généralisation de l'utilisation de l'outil informatique a créé une dynamique de piratage incontrôlable. Il n'est plus, en effet, indispensable de se rendre dans une salle de cinéma pour voir un film puisqu'il est tout à fait possible de le copier, ou encore l'acheter à bas prix sur un trottoir. Vendeur de CD-DVD sur un trottoir de la capitale, Amine raconte qu'il propose à la vente les films les plus récents et les mieux vendus dans le monde. Interrogé alors sur le coût de ces «œuvres», notre interlocuteur affirme qu'elles sont cédées à 150 DA ou 200 DA. Ce qui visiblement arrange beaucoup de personnes présentes devant l'étal. Le recours des citoyens à ce genre de produits s'explique en partie par la possibilité de le visionner au moment et à l'endroit qui arrange l'utilisateur, au lieu d'attendre de le voir au cinéma. D'ailleurs c'est depuis l'accès du public algérien aux chaînes satellitaires et au réseau Internet, une autre alternative de divertissement, que l'activité de ces salles s'est trouvée sérieusement pénalisée. Mina Adel