Concert n L'artiste Abdelkader Chaou a animé vendredi soir la 1re soirée ramadanesque à Koléa (Tipasa) organisée, comme chaque année, par la commune de Koléa en collaboration avec le Comité des fêtes de la ville. Lors de cette belle soirée d'été, les mélomanes étaient tous au rendez-vous au niveau de la salle des fêtes de la ville, après la prière des taraouih. La présence de familles et de femmes devient de plus en plus fréquente à Koléa au point que la gent féminine commence à prendre une place de fidèle du chaabi, elle aussi. Très touché par la forte affluence des mélomanes durant ce 5e jour de ce mois sacré, Abdelkader Chaou nous a exprimé sa satisfaction. Félicitant les artistes de Koléa honorés au cours de cette soirée, Chaou reconnaît que «Koléa est une ville des artistes. Elle a donné beaucoup de grands cheikhs qui ont participé à l'art du chaabi en général». L'artiste qui a fait la joie de ses mélomanes avec ses ksid et madih, nous a informés de la sortie, juste après le ramadan, d'un nouvel album avec une petite touche moderne au niveau des hwawate et avec de nouveaux musiciens «en réponse à la demande de mon public». Chaou, dont le carnet est chargé de programmes d'animation de soirées durant tout le mois de ramadan à l'échelle nationale, a récemment réalisé un coffret – à la demande du département de Khalida Toumi en collaboration avec l'Onda – qui ne compte, selon l'artiste, que des chansons entrant dans le cadre du patrimoine, cette richesse immatérielle. «Chaque artiste a réalisé un coffret de 10 CD accompagnés d'un recueil de k'sid chantés. 1 500 coffrets ont été réalisés à ce jour», nous a-t-il révélé se disant rassuré que «le chaabi commence à reprendre sa place grâce aux artistes. Notre interlocuteur appelle à ce que les jeunes talents soient encouragés, soutenus et suivis. Il nous cite l'exemple de l'émission annuelle de Abdelkader Bendaamache dans laquelle il se produira le 17 du mois en cours à l'Opéra d'Alger. «Les jeunes lauréats devraient être suivis. Il ne suffit pas de leur offrir des cadeaux et ensuite de les laisser livrés à eux-mêmes. Il faut leur programmer des tournées avec des artistes de renom afin de les encourager, de les former et leur faire enregistrer des CD pour les inciter à persévérer ». «Merci pour l'hommage» Ils ont bien servi le monde de la culture musicale de la ville de Koléa, chacun à sa manière et chacun avec son propre style ou son instrument musical. Adem Benouda, Abderrezak Menouer, Abdelwahab Louda et Mahmoud Slamani - dit Mourad - ont été très touchés d'avoir été honorés de leur vivant. El-hadj Adem Benouda, 81 ans, auquel était dédiée cette 1re soirée, nous a fait part de sa joie et de sa gratitude pour cette 1re initiative de la part de sa commune. Activant depuis plus de 60 ans dans la sérigraphie à ce jour, Cheikh Benouda adorait «taquiner» son compagnon musical en parallèle : le banjo dont il joue depuis 1953 notamment lors de fêtes et soirées avec Cheikh Ali El-Houati. Grâce à cet instrument professionnel que Mahboubati lui a acheté en 1955, il a participé à l'échelle nationale à des activités musicales et culturelles et a enregistré ses 3 premiers 33 tours avec feu Cheikh M'hamed Bourahla. Durant toute sa carrière, il a beaucoup travaillé avec les troupes des artistes de renom à l'instar de Abdelwahab Louda et Ali El-Houati. «Je me souviens de la présence dans une fête, de la grande moudjahida Djamila Bouhired», nous dit-il. Gardant toujours cet esprit jeune et sportif, cet ex-scout de Koléa nous dit quand même : «J'aime la jeunesse. On doit laisser la place aux jeunes maintenant.» Mais depuis la disparition de son ami feu Cheikh Bourahla depuis plus de 20 ans, Cheikh Benouda a oublié musique et banjo. Fondateur de l'association artistique et andalouse Dar El-Gharnatia de Koléa, il se limite à activer depuis 42 ans avec les membres de l'association au profit des jeunes de Koléa dans l'art andalou. Abderrezak Menouer Vendredi prochain, un hommage sera rendu à Abderrezak Menouer, un autre «banjoïste» âgé aujourd'hui de 84 ans. Ce musicien qui activait avec beaucoup d'artistes dont Bourahla, Ali El-Houati et Bouakez, se dit honoré par cette initiative précédée par celle que les mélomanes du Café des sports de Koléa lui ont dédiée le 31 décembre écoulé. Il a également activé avec la troupe de l'artiste Mohamed Sellami de Bougara (Blida) auquel il a offert son banjo professionnel qu'il avait depuis un quart de siècle. «Cet artiste est mon cheikh. Il a chanté un ks'id qu'il m'a dédié.» L'artiste, Menouer a ainsi quitté le monde de la musique depuis 6 mois seulement préférant prendre sa retraite et laisser la place aux jeunes après 60 ans de carrière. Une carrière qu'il a débutée à la rue du Chêne à Alger avec Ammi Saïd qui outre sa carrière professionnelle de chauffeur d'ambulance, était artiste. El-hadj Slamani Mahmoud Très touché par ce 1er geste, el-hadj Slamani Mahmoud,73 ans – dit Mourad – n'a pu cacher son émotion. Il se dit fier des responsables de sa commune qui rendent hommage à leurs artistes. El-hadj Slamani a longuement accompagné Ali El-houati au tar au même titre que Cheikh Bourahla et Abdelwahab Louda de 1963 à 1984. Soit 20 ans de carrière.Une carrière achevée, elle aussi, avec la disparition de cheikh Bourahla en 1984. «Depuis le décès tragique de feu Bourahla qui travaillait avec zaouali, je n'ai plus eu le courage de reprendre mon tar. Bourahla faisait la joie des familles et des mélomanes avec le peu de moyens qu'il avait au niveau du Café des sports ou ailleurs. L'orchestre pilote de Koléa activait, pour sa part, au profit des familles». L'as du tar, se rappelle que sa troupe n'était payée que par la rechka du public. «On payait symboliquement les membres de la troupe. Mais on sentait qu'il était de notre devoir de donner de l'argent de cette rechka au marié lorsqu'on animait les fêtes de mariage.» Avec une belle relève, il se félicite d'avoir été remplacé par ses 2 fils Mahfoud et Mohamed. Il se désole de constater la disparition rapide de l'association Bourahla pour le chaabi. Aujourd'hui, il est content – s'il est invité – de se rendre à toutes les soirées chaabies où qu'elles se tiennent. «Je suis les soirées des jeunes (m'saghar) qu'on oriente à ce jour en compagnie de mes amis car on veut laisser une relève», a-t-il souligné tout en nous révélant qu'il préfère les k'sid aux chansonnettes. El-hadj Abdelwahab Louda Le 3e vendredi sera dédié à un as de la derbouka, el-hadj Abdelwahab Louda, 69 ans. La disparition de feu Bourahla, l'a tellement affecté qu'il a, lui aussi, abandonné la musique. Il s'adonne depuis, à la recherche dans le patrimoine, notamment les musiques hawzie et el-aïssaoua. Il est quand même heureux de savoir qu'un jeune étudiant en biologie, chanteur chaabi, interprétera son k'sid tawassoul. Abdelwahab Louda se remémore les belles années passées avec des grands tel Bourahla. «Nous animions souvent des fêtes gratuitement pour les familles car ce qui nous intéressait, c'était la musique en tant qu'art et non en tant que commerce. Mais depuis le départ de notre compagnon, j'ai perdu le goût de la musique et je n'ai pu surmonter ma tristesse et ma douleur.» Dans le k'sid tawassoul plein de parties de douaad, el-hadj Louda brosse un tableau sur toutes les qualités d'une personne. «J'ai écrit 4 k'sid tawassoul dont un que j'ai donné pour être chanté par Mustapha Belahcene, Boubekeur Hattali et le jeune talent Lotfi Djennas. Le choix s'est porté sur ce dernier car je fais confiance à ses compétences. Je suis en train de le lancer mais à condition qu'il poursuive ses études...», a conclu ce compagnon d'El-Achab et de Ammar Ezzahi.