Résumé de la 105e partie n John tout en reconnaissant ses ennuis financiers et sa querelle avec sa belle-mère, tient à affirmer son innocence et celle de son frère dans ce crime... Je ne les ai pas reconnus. — Vous devez avoir une bien courte mémoire ! — Non, mais nous étions tous deux très en colère, et nos paroles, je crois, ont dépassé notre pensée. J'ai prêté peu d'attention aux termes mêmes de ma mère. Le reniflement incrédule de Mr Philips eut un triomphe d'adresse judiciaire. Il passa à la question de la lettre. — Vous avez produit ce document de façon fort opportune. L'écriture ne vous semble-t-elle pas familière ? — Pas que je sache ! — Ne trouvez-vous pas une ressemblance marquée avec votre propre écriture... mal déguisée ? — Non, je ne crois pas. — J'atteste que c'est votre écriture. — Je le nie. — J'atteste que, désireux de produire un alibi, vous avez conçu l'idée d'un rendez-vous fictif et assez improbable, et vous vous êtes adressé cette lettre afin de confirmer vos dires. — C'est faux. — N'est-il pas exact qu'à l'heure où vous déclarez avoir attendu dans un lieu solitaire et désert, vous étiez, en fait, chez le pharmacien de Styles Saint-Mary, où vous avez acheté de la strychnine au nom de Mr Inglethorp ? — Non. C'est un mensonge. — J'atteste que, vêtu d'un complet appartenant à Mr Inglethorp et affublé d'une barbe noire taillée comme la sienne, vous étiez chez le pharmacien, et vous y avez signé le registre. — C'est absolument faux. — Dans ce cas, je laisse au jury le soin d'apprécier la remarquable similitude qui existe entre l'écriture de la lettre, du registre et la vôtre, dit Mr Philips, qui se rassit avec l'air d'un homme qui a fait son devoir mais qui est indigné de dénégations aussi impudentes. L'audience fut ensuite renvoyée au lundi, vu l'heure tardive. Je remarquai que Poirot paraissait profondément découragé. Il fronçait les sourcils d'une façon que je connaissais trop bien. — Qu'y a-t-il, Poirot ? demandai-je. — Ah ! mon ami, cela va mal, très mal. Malgré moi, mon cœur fit un bond de soulagement. Il y avait évidemment des chances pour que John Cavendish fût acquitté. En entrant, Poirot refusa de Mary l'offre d'une tasse de thé. — Non, je vous remercie, madame. Je vais me retirer dans ma chambre. Je le suivis. L'air toujours préoccupé, il alla vers le secrétaire et y prit un petit jeu de cartes de patience. Puis il poussa une chaise jusqu'à la table, et, à mon ahurissement, il se mit solennellement à dresser des châteaux de cartes ! Je dus avoir l'air fort surpris, car il se hâta de me dire : — Non, mon ami, je ne suis pas encore retombé en enfance. Je calme mes nerfs, voilà tout. Cette occupation réclame la précision des doigts. Et la précision des doigts exige la précision du cerveau. Et je n'en eus jamais plus besoin qu'en ce moment-ci. A suivre D'après Agatha Christie