Ressources Décidément, cet homme a plusieurs cordes à son arc. Pierre Péan consacrera, dans L'Extrémiste, deux chapitres aux rapports et liens qu'a eus François Genoud avec la Révolution algérienne. En effet, avec le déclenchement de la Guerre de libération algérienne, François Genoud reprend du service pour porter aide et assistance aux acteurs de ce nouveau foyer de rébellion. Entre-temps, le voilà aussi en Suisse, derrière la création de la Banque commerciale arabe destinée à renforcer le commerce entre les pays arabes et ce pays. Dans ses multiples mouvements entre les pays du Bassin méditerranéen, il sera difficile aux différents services, qui le suivent depuis longtemps déjà, de le localiser. En fin brouilleur de pistes, il jouera longtemps au chat et à la souris avec les fins limiers du Mossad, entre autres. Retracer la toile d'araignée tissée par ce nazi impénitent est en fait une gageure. Et Pierre Péan fera de nombreux va-et-vient dans la chronologie du récit pour le suivre. Mais il demeure, comme l'écrit l'auteur, que «la grande affaire de sa vie a été l'Algérie (...). Le retraité s'enflamme en évoquant les noms d?Ahmed Ben Bella et de Mohamed Khider qu'il cite en tête de son panthéon algérien». Et c'est en toute logique qu'il fait la connaissance du tout-puissant Fethi el-Dib, responsable des services spéciaux égyptiens en charge du dossier algérien à cette époque. A côté de cela, fait paradoxal, il entretenait aussi des relations avec PauI Grossin, patron du Sdece (contre-espionnage français). Après l'indépendance, on retrouve François Genoud avec Mohamed Khider dans la fameuse affaire du «trésor du FLN» qui a empoisonné les relations de bien des leaders de la Révolution où «le 18 octobre 1962, en tant que patron et responsable des finances du FLN, Mohamed Khider dépose tous les fonds extérieurs sur un compte ouvert à son nom à la BCA de Genève, soit environ 42 millions de francs suisses...». Pierre Péan consacrera dans son ouvrage tout un chapitre au «trésor du FLN», une affaire dont certains tiroirs n'ont pas encore été ouverts. En retraçant son parcours, on remarquera que le Lausannois Genoud n'était pas un activiste d'opérette. Pour lui, une révolution n'avait rien de lyrique, c'était plutôt un engagement permanent. Un don de soi. Ainsi, dans le sillage de l'indépendance algérienne, Alger devient la mecque des révolutionnaires du monde entier. François Genoud, qui était très proche du pouvoir en place, y rencontre Abou Jihad, bras droit de Yasser Arafat. Outre les révolutionnaires algériens, les hommes liges de la cause palestinienne ? nous citerons entre autres Wadi Haddad, Fouad El-Shemali, Georges Habbache ? peupleront jusqu'à la fin de ses jours ce Suisse irrévérencieux. Dans L?Extrémiste François Genoud, de Hitler à Carlos, Pierre Péan aura réussi le tour de prestidigitation de nous faire revivre à travers un seul personnage, fil d'Ariane et néanmoins centre d'intérêt du livre, un véritable bal de revenants où nazis et révolutionnaires de tout acabit se retrouvent dans le parcours de cet homme. En refermant ce livre, on a l'impression que François Genoud a eu plusieurs vies, tant il a traversé les cinquante dernières années en épousant plusieurs causes.