Les rumeurs les plus folles courent à Bagdad sur le sort de la famille de Saddam Hussein : le président déchu bronzerait à Tel-Aviv, son épouse Sajida et ses trois filles seraient en Grande-Bretagne, Oudaï et Qoussaï, tués dans un raid américain, joueraient leur fortune à Monte-Carlo. En effet, pour beaucoup de Bagdadiens, malgré la publication des clichés par les Américains, la mort des deux fils de l'ancien dictateur constitue la preuve ultime d'un pacte secret conclu entre les Etats-Unis et Saddam Hussein. Installés dans le café Oum Kalsoum, Ali Abdel Hassan Haïdar, 52 ans, et Nasser Hindi, 50 ans, sont sceptiques sur l'opération américaine qui a pulvérisé, après quatre heures d'assaut, la maison de Mossoul (nord) où étaient cachés Oudaï et Qoussaï. Pourtant, en tant que chiites, ils auraient toutes les raisons d'être satisfaits de la fin des deux fils de l'ancien raïs irakien. Pour eux, l'affaire de Oudaï et Qoussaï a l'apparence d'une trahison comme la reddition de Bagdad devant les Américains, le 9 avril. Haïdar laisse entendre que les Américains paient Saddam Hussein pour faire commettre des actes de sabotage contre le réseau électrique et les oléoducs afin de freiner la reconstruction du pays, leur permettant de s'installer plus longtemps en Irak. Pour Nasser Hindi le président américain George W. Bush et Saddam Hussein ont eu un échange téléphonique peu avant les bombardements américains du 20 mars. Iyad Al-Moussawi, un marchand de Bagdad, fait chorus : «Saddam est peut-être à Tel-Aviv. Il est leur agent depuis 1980.»