L'euro s'est imposé depuis dix ans dans les porte-monnaie de millions d'Européens sans pour autant réussir à conquérir les cœurs ni les marchés, qui, aujourd'hui, remettent en question jusqu'à son existence. Utilisée dès 1999 par les marchés financiers, la monnaie unique a fait irruption dans la vie de tous les jours dans 12 Etats européens le 1er janvier 2002, date à laquelle les francs, deutschmark et autre lire ont tiré leur révérence. Aujourd'hui, la zone euro englobe 332 millions de personnes dans 17 pays. Mais avec la crise de la dette, qui a commencé en Grèce en 2010, avant de gagner progressivement toute la zone euro, les vieilles rancœurs ont refait surface, les eurosceptiques sont redevenus tendance et la méfiance entre pays du nord et ceux du sud de la région n'a jamais été aussi vive. Quant à l'identité européenne que l'euro devait cimenter, elle a pris un sérieux coup depuis la crise de la dette et les interminables tractations pour en sortir, les Allemands vilipendant la supposée «fainéantise» des Grecs ou des Italiens et les Français retrouvant récemment des accents de germanophobie. Pour les Européens, le passage à l'euro a renchéri le coût de la vie, selon des sondages récents. 85% des Allemands estiment que le passage à l'euro a entraîné une hausse des prix. En Espagne, 70% des citoyens pensent que l'euro ne leur a rien ou peu apporté. Ailleurs aussi, l'ardeur à rejoindre le club manque. Personne ne songe toutefois sérieusement à un retour aux anciennes monnaies nationales, même si la nostalgie gagne du terrain, notamment chez les Allemands, qui sont très attachés au deutschmarck.