Résumé de la 9e partie - Craignant d'être atteinte d'un cancer du sein, Djamila cède à la panique et affole ses enfants. Son mari parvient à la rassurer. En faisant jouer ses relations, Rachid a pu obtenir rapidement un rendez-vous à l'hôpital. La jeune femme, fortement secouée, a pris un congé ; lui-même a manqué ses cours à l'université pour l'accompagner. Elle pouvait s'y rendre seule, mais il a préféré être avec elle pour la soutenir. Les enfants, eux, sont à l'école : Djamila les a rassurés, en leur disant qu'elle n'avait pas peur et que tout se passerait bien. A l'hôpital, il faut attendre, dans une sorte de couloir interminable, aux murs, jadis blancs, aujourd'hui défraîchis et sans âme. Il y a, pêle-mêle, sur les bancs en bois, des hommes, des femmes et des enfants. Une fillette d'une dizaine d'années, la tête bandée, pleure en gémissant : «J'ai mal, j'ai mal !» Un homme, assis sur un autre banc, juste en face de Djamila, exhibe un cou déformé par une gigantesque tumeur aux contours rougeoyants. La jeune femme pousse son mari du coude. «Tu as vu ?» Rachid se contente de hocher la tête. Oui, il a vu… il voit tous les malheurs assemblés dans cette salle : ce jeune homme, d'une vingtaine d'années, maigre comme un clou, la peau d'une pâleur cadavérique, et cette femme aux pieds mangés par des ganglions… Il y a aussi des gens paisibles, qui semblent en parfaite santé mais eux aussi doivent avoir des «boutons», des tumeurs… Pourvu seulement que le bouton de Djamila ne soit pas une tumeur ! L'attente paraît interminable… Mais le tour de Djamila arrive. Quand l'infirmière l'appelle, il se lève pour entrer avec elle, mais il n'est pas autorisé à pénétrer dans la salle des prélèvements… Une autre attente, plus longue encore, plus pénible commence pour lui. un homme assis à côté, lui adresse la parole. — C'est votre femme ? — Oui, dit Rachid, distraitement. — Où a-t-elle sa tumeur ? — Au sein, répond-il machinalement. (il se reprend aussitôt). Elle n'a pas de tumeur, ma femme, c'est juste un bouton… Si elle fait des analyses, c'est juste pour nous rassurer qu'elle n'a rien. — C'est ce qu'on m'a dit, à moi aussi, dit l'homme tristement. C'était un bouton puis il a commencé à grossir, à grossir et on a diagnostiqué une tumeur… maligne ! Aujourd'hui, je fais des analyses pour voir si le cancer n'a pas gagné d'autres organes. Des métastases, pense Rachid, atterré. L'homme s'aperçoit qu'il a impressionné Rachid. — Ne vous inquiétez pas, dit-il, je suis sûr que votre femme n'a rien… un kyste sans doute ! — Sans doute, dit Rachid. Il se détourne légèrement pour signifier à l'homme qu'il n'a pas envie de discuter. Il s'enferme sur lui-même, essayant de faire le vide en lui. Djamila sort de la salle de soin. Il se lève et va vers elle. — Alors ? demande-t-il. — On m'a fait un prélèvement. Il faut attendre quelques jours pour avoir les résultats. Mais ne t'inquiète pas, tout ira bien ! Et pour lui montrer qu'elle est rassurée, elle sourit. (A suivre...)