Autrefois, entre l?île que forment la rivière et les étangs, s?élevait un moulin. Mais de nos jours, les passants n?aperçoivent que des ruines, un tas de pierres moussues où s?abritent quelques grenouilles et des hérissons... Ce moulin appartenait à un meunier et son fils, qui ne chômaient guère. Un jour, le père mourut à la tâche, laissant le jeune homme seul pour accomplir tout le travail. Saïd aimait entendre la roue du moulin tourner, il aimait sentir l?odeur du blé et de la farine fraîchement écrasée? Il était grand et fort, la peau aussi douce qu?un pétale de fleur et le regard énergique. Son unique amour, c?était cette grande bâtisse, et la besogne qui l?attendait ! La fée Soundoussa s?amouracha de lui en secret. Hélas, les fées ne peuvent aimer un mortel, cela ne se peut. Mais la magicienne voulut transgresser cette loi malgré tout ... Un soir d?été, vêtue de frais vêtements, elle alla frapper à sa porte : «Saïd acceptes-tu de venir danser avec moi ? Je n?ai pas de cavalier !» Et faisant mine de pleurer, sous ses grands cils d?or, elle tenta de capturer son c?ur. «Je n?ai pas le temps, la journée n?est pas terminée, il faut que je nettoie mon moulin?», lui a-t-il répondu, sans même la regarder. Puis, il ferma sa porte sans plus d?amabilités. C?est à peine s?il l?avait entendue tant il était préoccupé par son travail ! Soundoussa, vexée, se promit de revenir et cette fois, il ne manquerait pas de l?écouter? Quelques jours plus tard, elle fut de nouveau sur le seuil de sa maison. Cette fois, elle avait pris l?apparence d?une vieille femme toute cassée, ratatinée par le poids des années. «Petit, laisse-moi entrer ! J?ai ramassé tant de noix dans les bois et je suis si fatiguée : laisse-moi me reposer un peu dans ton moulin, à l?abri du vent !» Saïd ouvrit et se montra plus aimable que la fois précédente. Attentif au bruit de la roue à aube qui tournait, il lui tendit une chaise et continua sa besogne. «Petit, ne veux-tu pas quelques-unes de mes noix : elles te donneront de la force pour continuer ton ouvrage ?» Le jeune homme les déposa sur une table et les oublia aussitôt. Bien lui en prit, car la fée les avait trempées dans un philtre d?amour? Alors, sans se décourager, Soundoussa retourna chez le meunier. Cette fois, elle prit l?apparence d?une jeune biche blessée. Saïd la découvrit presque inanimée. Il l'emporta dans sa maison afin de la soigner et enduit sa patte d?un baume qu?il préparait lui-même. Ainsi, la fée resta ainsi pendant sept jours? Puis, ne pouvant résister plus longtemps, elle lui avoua tout : «Merci meunier pour tes soins, mais ce ne sont pas de tes médicaments dont j?ai besoin, c?est de ton attachement? ? La fée, tu t?es moquée de moi. Pourquoi être venue sous cette apparence ? Tu m?as fait perdre mon temps bien inutilement !» (à suivre...)