Résumé de la 1re partie Le vieil Elie, berger, 80 ans, ne voit quasiment plus. Voulant descendre de la véranda il tombe. Quelques instants plus tard il se retrouve assis dans un fauteuil et entend des murmures venant de la cuisine. Les Berger sont riches. Ils ont une usine à Calgary, qui construit des maisons préfabriquées. Ils ont des terres à blé dans le Middle West. Mais, à l?origine de la fortune, c?est bien sûr Jumping Creeck et ses dix mille têtes de bétail. C?est pour cette unique raison, d?ailleurs, et parce que c?est un endroit admirable, qu?on l?a gardé jusqu?à présent, car l?élevage de bovins, depuis la guerre, connaît des hauts et des bas. En ce moment, c?est le bas. Les cours de la viande se sont effondrés. Les derniers hivers, particulièrement rudes, ont fait une hécatombe dans l?immense troupeau qui dort à la belle étoile en toute saison. Aussi, la famille s?est-elle décidée à vendre. D?ailleurs, dans une maison plus petite, on pourrait mieux surveiller le vieil Elie. Quelque temps après sa chute sous la véranda, voici qu?il fait une nouvelle «bêtise» : un matin, les pluies ayant transformé la piste en bourbier, le cow-boy, qui vient chaque jour chercher la boîte à ordures avec le camion, ne peut parvenir jusqu?au ranch. La boîte à ordures reste donc toute la matinée dehors et un ours, comme cela se produit souvent, la renverse pour y manger ce qui lui plaît. Avant de repartir, l?animal veut faire un petit tour. C?est alors que le fils aîné, qui bricole dans le corral, entend un coup de feu venant du chalet. Il saute dans un camion et fonce jusque-là. En arrivant devant le chalet, il voit la porte ouverte. Et lorsqu?il saute sur la véranda, il reste pétrifié devant l?ours énorme qui sort de la maison. L?animal est ensanglanté. Mais, après une seconde d?hésitation, il s?enfuit. Heureusement ! Se trouver désarmé en face d?un ours blessé, c?est une situation désespérée. Le fils se précipite dans le chalet. Il trouve «le vieux» assis sur une marche au milieu de l?escalier, le fusil à la main. «Tu n?as rien ? ? Non. ? Qu?est-ce qui s?est passé ? ? J?ai tiré sur un ours. ? Je m?en doute, mais pourquoi ?» Le récit du vieux paraît invraisemblable. Il prétend qu?il s?est trouvé nez à nez sur la véranda avec l?ours, et que l?ours l?a suivi. Dans ce cas, comment a-t-il eu le temps de retourner dans l?atelier, d?ouvrir l?armoire, de prendre le fusil, de le charger et de monter dans l?escalier ? De toute façon, la seule chose à faire était de s?enfermer dans la cuisine. En outre, si le vieux est sorti avec son fusil, c?est qu?il a vu l?ours et qu?il avait l?intention de le tuer ! Idée qui ne viendrait à personne. Ici, les hommes et les ours s?évitent respectueusement dans une sorte de statu quo. Et quand on sait que le vieux est devenu complètement myope, ça relève de la tentative de suicide. Le soir même, Edith et son fils parlent de nouveau de la vente du ranch. Une société de Denver, aux Etats-Unis, leur en propose mille dollars l?acre. Ce n?est pas ce qu?ils espéraient, mais s?ils n?ont pas de meilleure proposition, ils accepteront. Car Edith sent venir l?hiver et elle en a assez des hivers de Jumping Creeck. S?il n?y avait qu?elle, elle irait le passer chez son plus jeune fils, à Calgary. C?est son vieux fou de mari qui s?y refuse. Il veut rester là. Il n?y a pas moyen de l?emmener ailleurs. Mais si le ranch était vendu, il serait bien obligé de partir. Et avec l?argent de la vente, ils pourraient s?installer dans un lieu plus clément. «Où ça ? demande le vieux quand on lui en parle. ? Je ne sais pas moi, à Calgary ! ? En ville ? Jamais ! ? Alors, sur la côte Ouest. ? C?est ça ! Au bord de la mer? sous les palmiers ! Et pourquoi pas à la plage ?» A cette idée, le vieil homme fait une horrible grimace qui montre ses dents noires. (à suivre...)