Manigance - Les concepteurs de la nation algérienne ont, dès l'indépendance, conjugué la fierté de la nation au masculin. Le mépris et le manque de considération affichés à l'encontre des moudjahidate, qui remontent aux années soixante, selon elles, viennent se confondre, en quelque sorte, avec la marginalisation de toutes les femmes repères de l'Algérie. Une situation qui s'est confortée avec le vote en 1984 à l'assemblée nationale du premier code de la famille qui a transformé la femme algérienne en une mineure à vie. Que cache réellement cette «misogynie» qui ne dit pas son nom? Pourquoi un peuple qui a été dirigé par une femme à un moment de son histoire est aujourd'hui aussi à la traîne des pays de la Méditerranée pour ce qui est de l'émancipation et les droits des femmes ? Des questions légitimes qui appellent les consciences nationales à assumer leurs responsabilités face à notre histoire pour un avenir meilleur. Pour en arriver là, il faut rendre à César ce qui appartient à César. L'histoire de la guerre de libération appartient à tous les Algériens. Elle doit être rédigée avec honnêteté et intégrité sans parti pris. Et sans trop vouloir sectionner la dimension douloureuse de ces annales dont certains veulent absolument se débarrasser. Nos moudjahiddine hommes et femmes représentent la mémoire collective du peuple algérien. Ils sont indissociables. Nos moudjahiddate méritent, en ce sens, respect, reconnaissance et considération. Elles ont marqué dans leur temps la société algérienne par leur courage et leur sacrifice. Un demi siècle après l'indépendance, des voix se sont élevées pourtant pour dénigrer ou diffamer des femmes ayant contribué, courageusement, à l'indépendance de notre pays. L'affaire Louiza Ighil Ahriz illustre à bien des égards cette campagne de diffamation et de dénigrement. Cette moudjahida qui a défrayé la chronique par ses témoignages sur la torture avait eu droit à un rappel à l'ordre, à tort ou à raison, par une figure de proue de notre révolution, à savoir Yacef Saadi. Si pour certains, ce rappel est lui-même un aveu de l'état d'esprit sexiste qui règne dans la sphère politique algérienne et que certains hommes publics n'hésitent pas à faire valoir, pour d'autres, c'est un règlement de compte entre deux figures historiques dont seule l'histoire nous révélera le fin fond. Rien toutefois ne justifie la remise en cause du passé révolutionnaire reconnu et attesté de Louiza Ighil Ahriz et d'autres moudjahidate. Un combat qui s'est poursuivi lors de la décennie noire qui a vu un engagement sans précédent de la part des moudjahidate pour la sauvegarde de la république. A cette époque aussi cruciale de l'histoire de l'Algérie, la famille révolutionnaire au féminin n'a cessé d'exprimer son dévouement permanent pour la patrie. Il suffit pour s'en convaincre de revoir les images de la marche du 22 mars 1993 contre le terrorisme. Ces images qui ont fait la Une de toutes les rédactions du monde ont donné un coup fatal aux plans de déstabilisation dirigés contre l'Algérie.