Il y a quelque trente années était né à l'université de Constantine un centre de recherche sous le nom de Curer (Centre universitaire de recherches et de réalisations), avec une feuille de route affichant de grandes ambitions. Le centre regroupait des équipes pluridisciplinaires et l'on s'attela à effectuer des enquêtes sur le terrain avec plusieurs objectifs dont un projet national appelé Carcovis (Carte d'amélioration des conditions de vie et de santé) sous la direction d'éminents professeurs. Toutes les disciplines étaient impliquées dans ce projet et l'on commença à travailler d'arrache-pied en omettant l'essentiel : définir le corpus même de la recherche, à savoir fondamentale ou appliquée et, durant de longs mois, deux «écoles» s'affrontèrent dans de longs et stériles débats qui débouchaient toujours sur des culs-de-sac empreints de teinte idéologique car, en ces années-là, les théories socialistes avaient encore cours et faisaient face à une conception très fondamentaliste de la recherche. Le projet capota lamentablement et tous les chercheurs furent renvoyés à leurs études avec l'enterrement du projet mort-né. Cet exemple illustre toute la petite idée que l'on se fait de la recherche en Algérie, perçue uniquement à travers quelques binocleux, rats de laboratoires studieusement penchés sur leurs expériences. D'autre part, les instituts de sondage, instruments indispensables, chevilles de la recherche, sont quasiment inexistants chez nous et s'ils activent, c'est pour donner des chiffres qui confortent une action démagogique. Jamais on ne commandera pour nous dire pourquoi ils sont si peu les Algériens à regarder la télévision nationale par exemple. Parce que la télévision officielle n'a pas, pour ainsi dire, une performance économique à accomplir, ni un marché publicitaire à disputer. Elle est la seule sur le marché. Mieux – ou pire – encore, des sociétés confrontées à une rude concurrence ne sollicitent pas des chercheurs pour améliorer le produit comme ces entreprises étrangères de produits laitiers qui innovent chaque mois en lançant un nouveau yaourt. Les nôtres de sociétés ont peut-être gardé les réflexes de l'économie étatique dirigée. Celle qui se passe de recherche. C'est un boute-en-train, chercheur de son état – et de l'Etat – qui le disait dans les années 70 : «Le problème de la recherche, c'est la recherche des problèmes…». Enfin, de quoi je me mêle ? Khelli l'bir beghtah.