Histoire - Ahellil est un chant ancestral et un genre folklorique caractérisant le Gourara, au Sahara algérien, berceau de la civilisation amazighe. Classé patrimoine immatériel universel par l'Unesco en 2005, parmi 43 genres artistiques d'expression orale, ahellil, qui est à l'honneur dans la ville touristique de Timimoun (Adrar), dans le cadre de la 6e édition du festival culturel de ce chant ancestral qui a débuté mercredi, est un «genre poétique et musical emblématique des Zénètes du Gourara», cette région du Sud-Ouest algérien riche par ses expressions culturelles orales, a souligné le chercheur Mohamed Salem Zaïd. Enraciné dans l'histoire et la culture des populations de la région du Gourara, dans le Sud algérien, l'ahellil qui revêt une grande importance chez les populations de cette région, consiste en des rythmes spécifiques, exécutés, généralement le soir, dans les lieux publics, lors de fêtes familiales, de mariages ou de visites de mausolées de saints patrons de la région. Le genre ahellil tire sa spécificité de la manière dont il est exécuté, à travers des chants interprétés par des participants assis en cercle, «taqrabet» qui signifie rapprochement. Le terme ahellil a plusieurs significations, dont «Ahl el Lil» (les gens de la nuit), parce que ce genre est généralement chanté la nuit, a indiqué le chercheur. Certains, en revanche, lui donnent une connotation religieuse, en l'associant à l'Islam, voire au mot «Tahlil», autrement dit la glorification du nom de Dieu par la lecture du Saint Coran et des louanges à Dieu, et eu égard à la nature des textes chantés glorifiant Allah. Les populations locales l'ont adopté, depuis des temps immémoriaux, lors de leurs fêtes et occasions heureuses, hérité de génération en génération avant même l'avènement de l'islam dans la région, a ajouté ce chercheur. Aujourd'hui chanté uniquement par les hommes, ce genre lyrique était par le passé interprété par des femmes, localement connues sous le nom d'el-goualat (chanteuses), à l'exemple de la regrettée Dada Hasna. Concernant la disposition de la scène de chant et de danse de l'ahellil, un groupe de quelque 100 hommes se dressent en cercle, au centre duquel «l'abechniou» (poète ou chanteur) se présente, accompagné de joueurs de tamdja (flûte) et du gallal (instrument à percussion traditionnel). La flûte joue un rôle essentiel dans le rythme qu'imprègne l'abechniou à l'interprétation lyrique, et dans le classement des morceaux poétiques qui sont repris et répétés par la chorale, de façon rythmée, en battant des mains, dans une symbiose singulière. Ce qui fait le charme de ce genre de musique, c'est bien la cohésion du cercle formé par ses exécutants qui traduit, dans une sérénité totale, la spiritualité des textes chantés au milieu d'une gestuelle cadencée au rythme des voix harmonieuses de la chorale imprimé par le chanteur. - Les textes d'ahellil abordent des thèmes tout aussi divers que la religion, la victoire, l'amour et la fidélité, et célèbrent les épopées et gestes populaires de la région. La danse d'ahellil s'exécute en trois étapes, la première «El Masrah» marque le début de la soirée par l'interprétation de chants religieux et de louanges aux saints patrons de la religion. La deuxième étape «Ougrouti» évoque les souvenirs d'enfance, les sentiments, les tiraillements, voire les conflits et tout ce qui à trait à la vie en communauté. Alors que dans «la Thara», troisième étape, les interprètes d'ahellil glorifient Dieu et implorent son pardon. La danse d'ahellil commence avec le jeu du flûtiste, en préparation de l'entrée du chanteur qui, d'une voix tonifiante, débute par les gammes les plus hautes accompagnées de battements des mains, sur des rythmes qui en régulent l'exécution. Cette gestuelle artistique se poursuit en harmonie entre le chanteur et le chœur jusqu'à ce que l'interprète achève son chant, sous le rythme envoûtant des louanges au Créateur chantés par la chorale : «Allah Ya Allah» et «Ya Moulana Ya Moulana»...