Résumé de la 2e partie - Aline indique aux gendarmes l'endroit où elle a enterré les enfants qu'elle a étouffés... Il se dit par moments : «C'est peut-être qu'elle est devenue folle l'Aline, à vivre des années avec un incapable. Elle s'est imaginé des enfants, et elle s'est imaginé qu'elle les tuait. On en a vu des folies comme ça, ça s'est déjà vu.» Le brave brigadier Mangin aimerait bien que l'Aline soit folle. Ce serait moins horrible, plus simple, ça rassurerait tout le monde. Oh! oui, on n'a pas l'habitude de l'horreur, dans ce village, pas l'habitude des monstres. La seule habitude, ici, c'est la normalité, la discrétion sur la vie des autres, la tranquillité en somme, sans voyou ni criminel, juste quelques braconniers. Alors, le brigadier Mangin est bien malheureux d'être là, à deux semaines d'une retraite aussi tranquille que le reste. Et il s'essuie le front, machinalement, en tournant un peu le dos au fossoyeur. Mine B. est de retour dans le bureau de la gendarmerie locale. L'un des hommes dit : «On lui met les menottes, brigadier ?» Les menottes ? Pour quoi faire ? Cette femme ne sera même pas poursuivie. Ces crimes ont dépassé la limite d'âge. Forclos. Terminé. Elle aurait même pu en parler avant. Le brave brigadier Mangin en est tout retourné. Plus impressionné par les pauvres choses trouvées dans la terre du jardin que par tous les cadavres de la guerre. Il le dit : «C'est inhumain ce que t'as fait, Aline ! Inhumain. C'était tes enfants, ton sang, t'as donc rien dans le cœur ? C'était pas mes enfants, c'était pas ceux de Léon, en tout cas. Comment j'aurais pu lui faire croire que c'était les siens ? — T'avais un amant ? Un amant ? J'ai jamais eu d'amant, moi ! Les amants c'est des histoires de livres. — Tu les as quand même pas faits toute seule,hein ? — C'était des passants. Je sais rien de plus sur eux. — La première fois, c'est parce que je voulais savoir comment c'était. Léon m'avait rien montré du tout. Il est passé un marchand de graines, et puis voilà. Quand j'ai vu que j'étais grosse, ça m'a fait peur. Vous pouvez pas savoir, vous ! J'ai dû me ficeler le ventre, me serrer comme une malheureuse. Et quand j'ai senti que ça venait, y a fallu que j'aille me cacher comme une bête. Vous pouvez pas savoir. Moi aussi j'en avais lu et entendu des histoires de femmes qui accouchent dans de jolis draps, et on leur apporte des fleurs, et le reste. Moi j'ai fait comme si j'étais malade, rien, de plus.» «La deuxième fois, j'ai essayé de dire à Léon : «Et si on avait un enfant, comme tout le monde, ça te dirait pas ?» J'étais prise. Je le savais. Mais il a même pas voulu faire semblant. «Pour le troisième, c'est pas de ma faute, c'est un "camp volant", un forain, ceux qui installaient leur manège pour la fête des moissons. Y m'a prise de force. J'ai tellement avalé de tisanes et de saletés, toutes les recettes je les ai utilisées, alors il est parti avant, et j'ai bien cru que j'en mourrais moi aussi. — Et ton mari ? Il t'a jamais posé de ques-tions ? Même quand il te voyait malade ? — Oh ! Léon ! (A suivre...)