Disparition - Une autre figure de la culture s'en est allée, laissant derrière elle un vide irremplaçable. Le réalisateur, Abderrahmane Bouguermouh, est décédé, hier, à l'âge de 77 ans, à l'hôpital de Birtraria d'Alger à la suite d'une longue maladie. Considéré comme le pionnier du long métrage amazigh, le cinéaste s'est rendu en effet célèbre par la réalisation, en 1996, du premier film en langue amazighe, La colline oubliée. L'adaptation à l'écran de cette œuvre de Mouloud Mammeri a été consacrée, rappelons-le, lors du 12e Festival du film amazigh de 2012 où elle a reçu «L'Olivier d'or», la plus haute distinction du festival. Ayant fréquenté l'Institut des hautes études cinématographiques (Idhec) de Paris, en France, Abderrahmane Bouguermouh, né en 1936, a, à son actif, plusieurs autres réalisations : Les oiseaux de l'été (1978), Kahla oua beïda en 1980, Cri de pierre (1986). Mais avant de se consacrer à la réalisation de longs métrages, Abderrahmane Bouguermouh, qui avait assisté Lakhdar Hamina, en 1973, dans le film Chronique des années de braise, avait réalisé, au début de sa carrière, vers la fin des années 60, des courts métrages. Il avait également tourné, en 1967, un autre moyen métrage, La grive. Il avait, en outre, contribué à la réalisation d'un épisode du film collectif L'enfer a dix ans (1968). Abderrahmane Bouguermouh était un militant de la cause berbère. Très tôt, il s'engage dans le mouvement revendicatif pour la culture berbère. C'est ainsi que, dans les années 1960, il prend contact avec les premiers intellectuels de la revendication berbère, à savoir Taous Amrouche, Mouloud Mammeri et bien d'autres encore qui ont milité pour la reconnaissance de l'identité culturelle berbère. Suite à l'annonce du décès d'Abderrahmane Bouguermouh, des artistes et des hommes de culture ont salué, dans des déclarations à l'APS, son engagement en faveur de la promotion du cinéma algérien et son rôle de «pionnier du film amazigh». C'est ainsi que l'ancien directeur de la cinémathèque d'Alger, Boudjemaâ Kareche, a salué les grandes qualités humaines de Bouguermouh et le poète qui s'est révélé depuis son premier court métrage, La grive. Pour lui, la sensibilité poétique de Bouguermouh a été confirmée par l'adaptation de La colline oubliée. «Avec ce long métrage, le cinéaste disparu a signé une œuvre d'une grande qualité esthétique, rendue en outre avec précision et fidélité au romancier», affirme-t-il. De son côté, Si l'Hachmi Assad, du Haut-Commissariat à l'amazighité, dira : «Abderrahmane Bouguermouh a beaucoup donné au cinéma en tamazight en apportant son soutien au festival, dont il a présidé la 7e édition, en particulier par l'encouragement constant apporté aux jeunes talents.» - Abdelhamid Rabia, acteur, rappelle : «Bouguermouh a fait partie du premier noyau de réalisateurs et d'hommes de culture qui avaient lancé les premières structures cinématographique de l'Algérie indépendante, à commencer par le Centre national cinématographique algérien (Cnc), créé en 1963 avant d'être dissous quatre ans plus tard.» Quant à Ahmed Benaïssa, comédien et metteur en scène, il tient à évoquer les grandes qualités humaines et professionnelles de Bouguermouh. «C'était un réalisateur d'une grande sagesse, un intellectuel convaincu, un homme à principes, jaloux de son identité, doublé d'un poète à l'humanisme extraordinaire», témoigne-t-il. L'acteur Saïd Hilmi, son ami de longue date, se rappelle, pour sa part, ses débuts à la radio, où il animait une des toutes premières émissions radiophoniques pour enfants, produites par Bouguermouh. Enfin, Hacène-Lhadj Abderrahmane, proche parent du défunt, insiste sur les qualités humaines de Bouguermouh que l'on retrouve, dit-il, dans ses œuvres cinématographiques. «Abderrahmane Bouguermouh était un poète du cinéma, un homme généreux et très sensible, autant de qualités qui ont marqué ses films», témoigne-t-il. Notons que l'enterrement aura lieu, ce mardi, à Ighzer Amokrane, dans la commune d'Ouzellaguen, à Béjaïa.