À la faveur de l'ouverture démocratique, en 1989, Abderrahmane Bouguermouh, a eu finalement l'autorisation de tourner la Colline oubliée, premier film d'expression berbère qui ne sera achevé qu'en 1996, non sans péripéties. Ayant connu un succès retentissant, notamment en Kabylie et en France, cette adaptation du roman de Mouloud Mammeri a fini par ouvrir une brèche dans l'histoire du cinéma amazigh. Bien qu'il ait beaucoup de projets qui lui tiennent à cœur, tels que le tournage d'autres films en berbère, notamment sur son ancien amie, feue Taos Amrouche, et le défunt chanteur Matoub Lounès, Abderrahmane Bouguermouh se voit aujourd'hui contraint de se battre contre la maladie. Lors de l'hommage qui lui a été consacré par l'association Horizons, certaines personnalités présentes ont tenu à rappeler ses mérites. Le cinéaste Ali Mouzaoui a estimé : “Dda Abderrahmane est un artiste raffiné qui a côtoyé beaucoup de sommités, dont feu Mouloud Mammeri, Taos Amrouche, etc. Il est aussi un homme de littérature, puisqu'il a déjà publié un livre intitulé Anza. De son talent, il aura marqué d'une empreinte indélébile les annales du cinéma algérien, en signant le premier film amazigh qui reste une référence dans le 7e art.” De son côté, le producteur et cinéaste Belkacem Hadjadj nous a déclaré : “Dda Abderrahmane reste un repère, car c'est un véritable professionnel dans le domaine cinématographique. La qualité dont il se distingue, c'est que tous les films qu'il a réalisés durant sa carrière de cinéaste correspondent parfaitement à ses convictions. Autrement dit, il a toujours tenu tête aux différentes pressions qu'il avait subies. C'est dire qu'il avait mené un combat des plus durs, mais il a fini par briser l'omerta.” La metteur en scène Hamida Aït El Hadj a évoqué l'universalité de l'artiste en affirmant : “On n'a pas beaucoup des Bouguermouh, des Hadjadj, des Mouzaoui, des Kateb… Ce sont des hommes exceptionnels eu égard à leurs valeurs inestimables. La notoriété de Dda Abderrahmane Bouguermouh dépasse nos frontières. C'est un artiste universel.” La comédienne Hayet Tadjer, qui a campé, alors qu'elle avait à peine 25 ans, le rôle de Sekoura alias Kou dans la Colline oubliée, a révélé : “C'était un grand plaisir, voire une fierté pour moi de participer à la réalisation du premier long métrage d'expression amazighe, que je compare à la première balle tirée dans les Aurès, un certain 1er novembre 1954, pour annoncer le début de la Révolution algérienne. Car, il a fallu près de 30 longues années pour que Dda Abderrahmane puisse concrétiser son projet. C'était un combat à mener contre les détracteurs de l'amazighité, à l'époque. Nous avions relevé un défi, celui de réussir le premier film berbère.”