Sortie - «Ce n'est pas parce que 70 % des dossiers de corruption présentés à la justice sont vides que l'épineux problème de la corruption n'existe pas.» C'est ce qu'a fait remarquer ce matin le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPPDH). Farouk Ksentini a estimé, sur les ondes de la Chaîne 3 de la Radio nationale, que le système judiciaire algérien présente des défaillances, en ce qui concerne la lutte contre la corruption. Si des peines de prison sont prévues à l'encontre des auteurs d'actes de corruption ou de détournement des deniers publics, celles-ci restent minimes vu l'ampleur du crime. M. Ksentini estime en effet que ces peines sont d'autant plus démesurées que les articles du code pénal qui traitent de la corruption et de la dilapidation de deniers publics ne tiennent pas compte de la somme dilapidée. Il a ainsi indiqué qu'un individu qui dilapide des milliards risquerait dans certains cas 10 années de prison alors qu'un jeune prévenu qui se rendrait coupable du vol d'un portable en risquerait la moitié. Ce qui fait dire à l'intervenant : «Il y a des textes aberrants dans le code pénal qui continuent à causer du tort.» «Je ne suis pas pour une répression féroce, mais une répression qui soit à la hauteur de la gravité du crime commis», a-t-il ajouté. M. Ksentini a, par ailleurs, expliqué que la détention provisoire et une mesure d'autant plus aberrante qu'injuste et qu'elle devrait être réduite au strict minimum. Selon lui, le prolongement de la garde à vue est aberrant et peut causer des préjudices sur le plan humain. Dans le même registre, le juriste a estimé que plusieurs dispositions concernant la garde à vue devraient être modifiées. Il a indiqué à titre d'exemple qu'il est inadmissible que cette mesure soit déterminée par une seule personne. «Il faut créer ce qu'on appelle une chambre des libertés qui serait chargée de décider de qui doit être mis en garde à vue et qui ne le doit pas», a-t-il suggéré. Enfin, pour ce qui est de la torture, l'intervenant a affirmé que s'il y a des articles qui sont respectés dans le code pénal, ce sont bien ceux inhérents à l'usage de la torture sous toutes ses formes que ce soit dans le milieu pénitentiaire ou ailleurs. Il a indiqué que hormis les quelques pressions psychologiques utilisées dans les investigations, «la torture est quasiment inexistante en Algérie». Essais nucléaires de Reggane «Il faut lever le secret défense» Concernant les essais nucléaires opérés à la fin des années 1960 dans le désert algérien et leurs répercussions dramatiques, M. Ksentini a demandé à ce que les autorités françaises lèvent le secret défense sur cet épisode noir. «Pour qu'on puisse localiser le lieu exact où ont eu lieu les essais pour éviter les éventuelles contaminations radioactives», a-t-il lancé. Il y a lieu de signaler que plus de 17 expériences nucléaires ont été effectuées dans le désert algérien principalement dans la localité de Reggane à la fin des années 1960 et que des dizaines d'Algériens avaient été acheminés de force, à bord d'avions-cargos militaires dans les zones où avaient lieu les expériences pour servir de cobayes humains.