Drame Un homme a perdu la vie dans une affaire dont on ne connaît pas tous les dessous. La famille de la victime porte de graves accusations contre l?appareil judiciaire. La tutelle va-t-elle réagir ? Djamel Taleb est mort. Au prix de sa vie, il a voulu envoyer un message fort au nom de tous les anonymes algériens qui, dans le désespoir de leur isolement, de leur grande détresse, n?ont très souvent d?autre recours que celui de sauter le pas vers un monde où ils espèrent trouver plus de justice et moins de répression et d?arbitraire. La particularité du suicide de Taleb est qu?au-delà de l?expression du désespoir, c?est un acte politique. Jusqu?aux derniers instants de sa vie, il a combattu la hogra dont il a été l?objet. Jusqu?au dernier souffle, il s?est voulu offensif car choisir de mourir dans l?enceinte de la Maison de la presse de la façon la plus atroce, et donc la plus frappante pour les esprits, ne peut aucunement être fortuit. Comme beaucoup de ses compatriotes, il a vu ses rêves se briser l?un après l?autre. Les accusations portées par sa famille aujourd?hui endeuillée, sont très graves. «Un bien que nous avions acquis à 700 millions a été vendu à notre insu à 250 millions. On a tout manigancé à la justice pour céder notre bien à un gros bonnet contre une modique somme.» Le plus curieux dans ce drame est le silence observé par les officiels. Aucun communiqué, aucun commentaire ni déclaration à propos d?un citoyen qui est allé jusqu?à s?immoler pour rompre son isolement. Le moins que le ministère de la Justice puisse faire est d?ouvrir une enquête sur les accusations de la famille. Ce serait l?expression minimale du respect dû au citoyen qu?était Taleb et à sa famille. Le cas échéant, il y aurait le risque d?une banalisation dangereuse d?un acte d?ultime désespoir. S?immoler par le feu sur la place publique deviendrait alors une banalité dans une Algérie plurielle et démocratique. La semaine dernière, un handicapé a menacé de s?immoler de la même manière à Annaba pour se faire entendre. Cet état d?esprit dénote d?un grave déficit en communication, d?un fossé que, visiblement, les étapes successives de démocratisation des institutions n?arrivent nullement à combler, entre gouvernants et gouvernés. Une enquête que déclencherait le ministère de la Justice sur cette affaire serait certainement une amorce de nouveaux rapports.